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Rédigé le 14 septembre 2000
Changer de banque :
Trois bonnes raisons pour trouver mieux ailleurs.

Pourquoi restez-vous à la Bred ? En bâtissant sa dernière campagne publicitaire autour de cette question, ce réseau des Banques populaires aborde un sujet tabou. "On sait que les gens peuvent partir, explique Stéphane Corre directeur du marketing de la Bred. Ce slogan est un clin d’œil pour leur montrer que nous voulons conserver leur confiance en leur apportant un petit plus chaque jour." Une révolution, car jusqu’à maintenant les banques avaient plutôt tendance à abuser de la patience de leurs clients en considérant que le risque de les perdre était infime. Et à juste titre, car moins de 3% des Français changent de banque chaque année. Cette fidélité est presque un paradoxe alors que ces mêmes clients se plaignent régulièrement des frais élevés, du mauvais service, voire des erreurs de leur banque. Du coup, plus de 600 000 personnes seraient déterminées à trouver une nouvelle banque chaque année. Si vous en faites partie ou si vous hésitez encore, voici trois bonnes raisons de changer de banque.

Votre banque vous coûte cher
Le plus souvent, c’est à l’occasion d’un désaccord que l’on claque la porte de son agence. Selon une enquête de l’association française des banques (AFB), 42% des clients qui changent d'établissement invoquent leur mécontentement concernant une décision de ce dernier. Seuls 26% partiraient parce qu’ils ont trouvé une meilleure proposition. Il est vrai que quand tout va bien, peu de gens se préoccupent de savoir combien leur coûte réellement leur banque. Les clients pensent rarement à consulter les dépliants tarifaires et ne prêtent pas attention aux petites commissions prélevées sur leur compte au fil des mois. Pourtant ils feraient bien. Selon l’Institut national de la consommation (INC), les prix des services bancaires ont augmenté cinq fois plus que le coût de la vie depuis 1988. En relisant attentivement ses relevés des douze derniers mois, chacun de nous peut mesurer précisément le poids de ces commissions à répétition. "Au total, ma banque me coûte plus de 1500 francs par an", s’exclame Marie Guillomet, cliente du Crédit lyonnais, après s’être livrée à cet exercice. Il est vrai qu’avec une carte Visa premier à 760 francs, la consultation de ses comptes sur Internet à 36 francs par mois et des virements automatiques à 6,27 francs l’unité, l’addition grimpe vite. Bien sûr, tout le monde n’a pas besoin d’une carte Premier et toutes les banques ne facturent pas aussi cher leur service Internet. Il reste néanmoins bien difficile d’échapper aux frais et commissions de toutes natures.

Bien que la facturation des chèques ne soit pas encore officielle, certaines banques ont déjà trouvé un moyen d’y habituer leurs clients. Ainsi, il est théoriquement impossible de se procurer un chéquier à la Bred sans payer. L’envoi du chéquier ou son retrait au guichet est facturé entre 10 et 20 francs de frais. Certaines banques prélèvent aussi des frais qu’elles ont du mal à justifier lorsque les clients s’en aperçoivent. Isabelle Renaut a ainsi découvert un jour que le Crédit lyonnais lui ponctionnait 80 francs par an de commission d’assurance sur compte parrainé dont la banque n’a jamais été en mesure de justifier l’origine. D’autres banques utilisent la facturation comme moyen de pression pour vendre des produits financiers supplémentaires. "Un jour, j’ai reçu une lettre du CCF me prévenant que j’allais devoir payer près de 120 francs de frais de tenue de compte par mois mais on m’a expliqué à l’agence que je pourrais y échapper en achetant des sicav de la banque", se souvient Geoffroy Frémont qui a aussitôt transféré son compte au Crédit agricole. Cette pratique commerciale est de plus en plus fréquente dans la vente des services bancaires.

"J’ai voulu ouvrir un compte au Crédit du Nord, mais un conseiller m’a prévenu que je ne pourrais pas avoir de carte bleue sans prendre une convention Norplus à 540 francs par an", explique Claudine Coste. Evidemment, il n’était pas question qu’elle cède à ce chantage. D’autant qu’une récente étude réalisée par la Confédération consommation logement et cadre de vie (CLCV) a démontré que ces conventions de compte coûtaient plus chers aux clients qu’une facturation séparée des services qui leurs sont réellement utiles. Selon cette association de consommateurs, ce surcoût atteindrait 112 francs par an pour la convention Tranquilité du Crédit lyonnais, 125 francs avec le forfait Norplus du Crédit du nord, 135 francs pour le contrat Présence de la BNP et jusqu’à 446 francs pour le package Eurocompte confort du Crédit mutuel.

Il y a moins cher et mieux
Si les clients invoquent d’abord un désaccord comme motif de leur départ, l’excès de frais et le manque de transparence en sont souvent les raisons cachées. D’autant que, dans ce domaine, la fidélité ne paye pas. " Alors que toute ma famille avait ses comptes et des placements au Crédit mutuel, le directeur de l’agence n’a fait aucun effort pour me proposer un taux intéressant", se souvient Francis Hartin, un jeune médecin qui souhaitait emprunter pour acheter son cabinet. Déçu par cette attitude, il s’est tourné vers la concurrence. La Caisse d’épargne lui a proposé un taux inférieur de 1,5% à celui de sa banque, ce qui représente un gain de plusieurs dizaines de milliers de francs. Que ce soit pour payer moins d’intérêts sur son crédit, moins de frais sur la gestion de ses finances quotidiennes ou moins de commissions sur son portefeuille boursier, il est donc possible de faire des économies en cherchant la banque la plus compétitive pour l’utilisation qu’on en fait.

"Les services bancaires que j'utilise sont très limités, je cherchais simplement une banque qui ne fasse pas payer du tout sa carte bleue", explique Cyrille Guillard. En prenant une carte Adesio, à 275,50 francs par an à La Poste, il bénéficie d’un système de fidélisation qui lui permet de ne plus payer de cotisation à partir de la deuxième année en fonction des points qu’il accumule. En outre, La Poste reste une des banques les moins chères pour de nombreux services. Sans compter le fait que toutes les correspondances sont exonérées de timbres. En revanche, le champion du courrier accuse quelques retards sur Internet. "J'étais à La Poste, je suis maintenant à la Banque Directe, explique David Beaubeau. Cela me convient parfaitement car je peux consulter mes comptes et faire des virements depuis mon ordinateur gratuitement." La banque sans guichet propose par ailleurs la carte Visa internationale à débit différé la moins chère de France, à 170 francs par an… Mais pas de système de fidélisation pour l’avoir gratuite. Si vous payez souvent des petits montants par carte en Europe, les frais les moins élevés sont à La Poste, à la Banque Directe et à la Caisse d’épargne d’Ile de France.

Pour ce qui concerne les opérations boursières, le Crédit Agricole d'Ile de France reste plus intéressant parmi les grands réseaux. Mais vous trouverez des propositions encore plus économiques auprès des courtiers en ligne. Bien sûr, vous pouvez aussi menacer votre banquier de le quitter pour négocier des réductions de frais. "Quand j’ai annoncé à la Société générale que je voulais transférer mon portefeuille chez Fimatex, mon chargé de compte m’a proposé des tarifs strictement identiques à ceux du courtier en ligne", confie un client très averti. Mais ne surestimez pas votre pouvoir de négociation car les banques n’accordent de telles faveurs qu’à leurs clients les privilégiés. De plus, tout le monde n’a pas envie de passer son temps à marchander. Aujourd’hui, de plus en plus de gens veulent que les meilleurs prix soient affichés noir sur blanc, et pas seulement réservés à une élite. "J’en ai eu marre des pratiques de négociation des banques, j’ai fini par domicilier mes comptes à La Poste car les tarifs y sont plus transparents ", confirme un lecteur.

Changer de banque est souvent moins compliqué qu’on le croit
Changer c’est avant tout une question de disposition psychologique. "Les gens changent de banque quand ils déménagent ", explique Stéphane Corre directeur du marketing de la Bred. Au guichet, l'accueil se révèle souvent très chaleureux lorsque vous expliquez que vous êtes à la recherche d’une nouvelle banque. En théorie, l'ouverture de votre nouveau compte nécessite une pièce d'identité, un justificatif de domicile et vos trois derniers bulletins de salaire et l'affaire est jouée vous dit-on à la banque. Mais dans les faits tout n'est pas aussi rose, ni aussi rapide

"A la BNP on me proposait une simple carte de retrait pendant une durée de six mois" s’étonne Alain Plon, jeune cadre sorti d'une grande école mais mal reçu à la banque de Rolland Garros. Certains établissements n’hésitent pas en effet à demander un sérieux dossier avant de vous ouvrir leurs portes. Une fois franchi cette étape, le transfert peut prendre plus ou moins de temps. Si vous n’avez qu’un compte courant, une semaine ou deux sont nécessaires pour obtenir un nouveau chéquier et une nouvelle carte. Vous devrez ensuite envoyer vos nouvelles coordonnées bancaires (RIB) pour faire suivre les virements et prélèvements automatiques sur votre nouveau compte, par exemple à EDF-GDF, France Télécom, la Sécurité sociale ou votre mutuelle. Pour les impôts, vous devrez remplir un nouveau formulaire d'adhésion de mensualisation. Ce changement doit être réalisé avant le 20 du mois, afin que les prélèvements soient effectués sur le nouveau compte dès le mois suivant.

Vous devrez ensuite dénouer certains liens qui vous unissent à votre banque comme les prêts immobiliers. "Si le client a un crédit, il ne peut pas clôturer son compte, précise-t-on à la Société Générale. Mais il peut conserver un compte sans chéquier ni carte, avec les seuls mouvements du crédit immobilier" . Votre nouvel interlocuteur peut également vous proposer un autre crédit pour rembourser celui de la banque que vous quittez. Il en va de même pour les livret A, livret Jeune, comptes à terme et fonds de placement dont le transfert ne présente aucun intérêt. Soit vous les clôturez, soit vous les conservez en l'état.

En revanche, vous pouvez faire transférer vos PEL, CEL, PEP et PEA. En principe votre nouvelle banque s'en occupera à votre place. Mais l'ancienne vous fera payer cette infidélité. Ainsi, la Poste facture 295,18 francs pour transférer votre PEL et il vous en coûtera 263,79 francs au Crédit du nord, 300 francs au CCF, et 350 francs à la Société Générale. Et la note est encore plus salée pour un compte titres. A la Société Générale, on vous retiendra 947 francs pour un portefeuille de trente de lignes (31,50 francs par ligne virée) et au Crédit Mutuel l’opération vous coûtera 350 francs plus 30 francs par ligne, soit 1.250 francs. La Caisse d’épargne Ile de France a opté pour un forfait de 603 francs, avantageux pour les gros portefeuilles. Le coût de votre départ doit donc être envisagé et planifié sérieusement.

En effet, en voulant aller trop vite, vous risquez d’oublier un ou deux détails pour lesquels votre ancienne banque ne vous fera pas de cadeau. " J’ai entièrement vidé mon compte avant de partir du Crédit Agricole. Quelque mois plus tard, celui-ci m’a réclamé près de 130 francs de frais pour rejet de prélèvement" explique Bertrand Ravallec. Alors même si vous êtes en colère, ne vous précipitez pas. " Vous avez intérêt à conserver votre ancien compte et à veiller à son approvisionnement" rappelle judicieusement le Trésor au dos de votre feuille d’imposition. Très bon conseil, en effet, qui vous évitera en outre de payer des frais non négligeables de clôture de compte : 218 francs à la BNP, 200 francs au Crédit Mutuel et au CIC Paris. Pour éviter ces désagréments, mieux vaut donc conserver une somme d'argent sur votre ancien compte pendant quelques semaines afin de prévoir des débits éventuels : un chèque non encaissé ou un prélèvement oublié. Faites vos comptes pendant quelques temps et pointez bien tous vos chèques et vos prélèvements sur les relevés de votre ancienne banque et sur votre nouveau compte. Une fois que vous êtes sûr que votre ancien compte ne sera plus débité, vous pouvez le laisser en sommeil avec un solde de quelques centimes. Et puis, si les services de votre ancienne banque redeviennent un jour plus compétitifs, il vous sera plus facile d’y revenir.

Gilles Pouzin
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