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Rédigé le 02 juillet 1997
Empruntez tant qu'on vous prête :
Comment profiter des soldes sur les prêts personnels.

Chiffres
Vive les soldes d'été! Dès le début du mois de juin, les affiches se sont multipliées dans les vitrines des agences bancaires pour offrir des prêts personnels, tous plus intéressants les uns que les autres. «Prêt de printemps. Taux exceptionnels à partir de 4,9%», proclame la Société générale. Pour des crédits de plus de 50 000 francs sur moins de 18 mois, l'offre promotionnelle de la BNP est même descendue jusqu'à 4,85%. Autre banque, autre formule. Pour des durées plus longues, jusqu'à cinq ans, le Crédit lyonnais a envoyé un courrier à tous ses bons clients pour leur offrir des prêts à 6,7% pour plus de 40 000 francs. Les autres banques ne sont pas avares d'offres alléchantes, comme le montre notre tableau. La concurrence fait rage et il est de plus en plus facile d'emprunter à des taux intéressants, à condition de s'y retrouver dans le labyrinthe des taux affichés et des taux réellement pratiqués, compte tenu des frais. Enfin, emprunter n'est pas une fin en soi. Pour optimiser au mieux cette ressource de financement, il faut bien évaluer ses besoins et calculer son plan de remboursement. En gardant en tête ces règles de prudence élémentaires, l'Expansion vous donne trois bonnes raisons d'emprunter tant qu'on vous prête.

- Profitez de la baisse des taux et de la concurrence.
Depuis longtemps, la léthargie de l'économie a entraîné une forte baisse des taux sur les marchés financiers. Le rendement des emprunts à dix ans est descendu autour de 5,6% et la Banque de France a fini par baisser le loyer de l'argent à court terme, faisant descendre les taux d'intérêt à un an jusqu'à 3,5%. Ces baisses ont cependant mis longtemps à se répercuter aux guichets des banques. Le coût des prêts immobiliers a déjà bien diminué, mais les taux des crédits à la consommation et des prêts personnels restent toujours nettement plus élevés. Sauf en période de promotion. «Nous faisons régulièrement des offres promotionnelles, explique une porte parole de la BNP. En mars nous avions fait une opération spéciale sur les crédits automobiles à 6%, en juin nous avons baissé nos taux à court terme à 4,85%, mais aujourd'hui ils sont remontés au tarif normal de 8%.» Autrement dit, si vous envisagez d'emprunter mais sans besoin urgent, attendez les prochaines soldes. Ou profitez tout de suite de celles qui se prolongent. La Société générale a ainsi prolongé son offre promotionnelle jusqu'au 13 juillet 97, et le C.I.C. jusqu'au 15 juillet 97.

Pas de panique. Même si vous avez raté les soldes, il y a toujours moyen de négocier des taux intéressants. Il suffit pour cela de faire jouer la concurrence, ce qui est d'autant plus simple que les banques se livrent une compétition acharnée pour récupérer de nouveaux clients. Il suffit de rentrer au hasard dans quelques agences de quartier pour s'en rendre compte. «Vous avez sûrement des projets, nous explique-t-on dans une agence du CIC. Nous sommes sûrement moins cher que votre banque actuelle.» Poussez la porte quelques mètres plus loin. «Venez nous voir avec votre offre de crédit et nous pourrons sûrement vous offrir mieux», répond un chargé de clientèle de la BNP. «En dehors des offres promotionnelles, on est un commerce comme un autre, concède-t-on au siège de la BNP. Si quelqu'un a du poids pour négocier et sait bien le faire, il peut obtenir des conditions sur mesure.» La règle du jeu est finalement assez simple : faites le tour pour trouver les meilleures offres et parlez-en à votre banque habituelle, qui saura généralement faire un petit effort supplémentaire pour vous garder chez elle (voir Tableau comparatif des prêts).

Faire jouer la concurrence, c'est bien. Mais attention à l'illusion d'optique des crédits à taux bradés, ils ne sont pas forcément les moins chers au bout du compte. «Un taux, on peut tout y mettre et tout y cacher», résume un chargé de clientèle aux Banques populaires. Pour bien comparer, il faut faire le calcul de la somme que l'on vous prête réellement une fois payés les frais de dossier et des mensualités que vous devez rembourser en incluant le coût de l'assurance. Prenons par exemple l'offre du Crédit lyonnais, pour un prêt de 50 000 francs sur 5 ans à 6,7%. Il faut commencer par ajouter 0,53% d'assurance décès obligatoire, ce qui porte le taux de départ à 7,23%. Avec ce taux les mensualités de remboursement sont de 796,40 francs pendant soixante mois. Mais pour trouver le taux effectif global, le TEG, tout compris, il faut tenir compte des frais de dossier. Dans ce cas, 1% du montant emprunté, soit 400 francs, plus 68 francs de droits d'enregistrement. En réalité, on emprunte donc seulement de 39 532 francs. Rembourser cette somme en soixante mensualités de 796,40 francs équivaut à payer un taux effectif global de 7,73%. Le calcul du TEG est encore plus compliqué quand l'assurance décès ne porte pas sur le capital restant dû mais sur le capital emprunté, comme à la Société générale. En résumé, la seule chose importante est de savoir de combien l'on dispose et ce que l'on doit rembourser.

- Anticipez vos besoins.
Profiter de la baisse des taux n'est pas la seule bonne raison pour emprunter pendant les soldes. L'avantage le plus évident de ces périodes de promotion est surtout qu'elle rend les banquiers très arrangeants. Pas de rendez-vous fastidieux ni d'attente interminable. Pas de marchandage au refus de dossier pour vous faire avaler des frais et des taux prohibitifs. Les banquiers veulent rarement vous prêter autant d'argent aussi facilement, surtout quand vous en avez besoin. Du coup, mieux vaut anticiper ses besoins et faire des provisions plutôt que d'attendre d'être à découvert pour négocier avec un couteau sous la gorge.

Prenons l'exemple d'un épicurien qui ne se prive de rien pendant les vacances d'été, qui ne se serre pas la ceinture à la rentrée et qui doit en plus payer ses impôts en septembre. Le dernier trimestre est déprimant : un découvert de 10 000 francs début octobre qui se creuse jusqu'à 19 000 francs fin décembre. Non seulement il doit affronter les menaces et les harcèlements de son banquier, mais en plus il lui abandonne 653 francs d'agios et 294 francs de frais pour "incidents de paiement", soit 947 francs pour un découvert moyen de 15 000 francs sur trois mois, c'est à dire un taux d'intérêt annualisé un peu supérieur à 25%.

Sur des petites sommes et des périodes courtes, les prêts des banques sont moins chers, même si les frais rendent leur taux plus élevé qu'il n'y paraît. Pour un prêt de 20 000 francs sur un an, par exemple, l'offre à 4,9% de la Société générale se transforme en TEG à 14%, c'est à dire le même taux que celui des crédits permanents de Cofinoga. Avec des remboursements un peu plus rapides, la formule Axedis du Cetelem propose un taux inférieur, de 10,68%.

Le taux d'intérêt lui même n'a pas du tout le même impact que pour un prêt à long terme. Une différence de 1% de taux sur un prêt de 20 000 francs sur un an coûte 110 francs. Pour un prêt de 100 000 francs sur cinq ans cette différence de 1% coûte 2800 francs. Et sur un prêt de 500 000 francs sur quinze ans, 1% de différence de taux coûte 49 500 francs.

- Constituez-vous un patrimoine.
Il y a deux façons de se constituer un patrimoine : épargner en partant de rien ou allouer la même somme mensuelle au remboursement d'un prêt. Cette stratégie est en fait bien plus répandue qu'on ne le croît. C'est exactement ce que font tous les petits propriétaires qui achètent un studio à crédit pour le mettre en location. Le loyer ne couvre pas leurs mensualités mais la différence qu'ils mettent chaque mois de leur poche leur permet de se constituer un patrimoine. Par exemple, un studio de 35 mètres carrés acheté 450 000 francs à crédit sur quinze ans peut rapporter environ 3 000 francs par mois pour une mensualité de remboursement de 4 000 francs.

On peut appliquer le même raisonnement avec les placements financiers. En remboursant une mensualité de 1 500 francs par mois pendant sept ans, vous pouvez emprunter 100 000 francs et les placer en actions françaises avec un PEA ou en actions internationales par le biais d'un contrat d'assurance vie. Evidemment, les risques ne sont pas les mêmes. D'un côté la Bourse est très volatile et l'on peut se retrouver au bout de sept ans avec moins que ce que l'on a investi. De l'autre côté, les loueurs de studios doivent affronter les mauvais payeurs, les périodes sans locataire, l'entretien de leur logement et la fiscalité foncière. Maintenant que les prêts personnels sont au même taux que les prêts immobiliers, les épargnants ont en tout cas plus de choix pour se constituer un patrimoine.

Gilles Pouzin

Tableau comparatif des prêts
Banque Barême de taux affiché Exemple Taux annoncé Mensualité TEG
Société générale 4,9% pour plus de 20 000 jusqu'à 18 mois 30 000 sur 18 mois 4.90% 1,741.07 6.86%
Société générale 6,5% pour plus de 50 000 jusqu'à 3 ans 50 000 sur 3 ans 6.50% 1,532.45 7.18%
CIC 6,7% pour plus de 40 000 jusqu'à 7 ans 50 000 sur 7 ans 6.70% 760.02 7.53%
Banques populaires 7,5% pour plus de 50 000 jusqu'à 7 ans 50 000 sur 7 ans 7.55% 768.19 7.55%
Crédit Lyonnais 6,7% pour plus de 40 000 jusqu'à 5 ans 40 000 sur 5 ans 6.70% 796.40 7.73%
BNP 8% à 10,25% selon montants 50 000 sur 5 ans 8% 1,026.79 9.09%

Source: Gilles Pouzin

Note: «Un taux d'intérêt, on peut tout y mettre et tout y cacher», explique un directeur des Banques Populaires.Ces dernières préfèrent afficher uniquement leur taux effectif global (TEG) c'est à dire le taux que l'on paye réellement compte tenu de tous les frais de dossier et d'assurance. Dans les autres cas, il ne suffit pas de comparer les taux affichés. Pour calculer l'intérêt réel d'un prêt, il faut comparer la somme dont on dispose vraiment et les mensualités que l'on doit rembourser. Il faut aussi faire jouer la concurrence pour négocier un rabais.


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