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Rédigé le 25 novembre 1996 |
Nathalie
Rachou
39 ans, HEC
Premier poste : cambiste
Poste actuelle : Directrice Générale Mondiale du Département
Marché des Changes de la Banque Indosuez.
A
ses débuts, les métiers de la finance étaient plus misogynes
Sur les marchés, le talent n'attend par le nombre des années.
A 21 ans, à peine sortie d'HEC, Nathalie Rachou commence sa carrière
de cambiste sur le marché des changes. "Les métiers de la
finance étaient beaucoup plus misogynes quand j'ai débuté
dans la City, il y avait très peu de femmes cadres. Il fallait voir les
regards des banquiers quand on rentrait dans un restaurant", se souvient-elle
amusée. Elle découvre sa vrai vocation de manager avec la création
du Matif, le marché à terme français, en 1986. "J'ai
démarré toute seule avec une secrétaire, explique-t-elle.
Mais ça a été un succès dès le premier jour
et j'ai dit à mon patron que ça ne serait pas un boulot à
mi-temps. J'ai du recruter en moyenne une ou deux personnes par mois pendant
cinq ans. J'ai grandi en même temps que la structure créée,
démarré avec des responsabilités opérationnelles
et commerciales avant d'évoluer vers un rôle complet de management."
Après douze années passées sur les marchés, Nathalie
Rachou se voit confier le poste de Secrétaire générale
de la banque Indosuez pendant cinq ans. Au début de 1996, elle est nommée
à la tête des activités de change mondiales et retourne
vivre à Londres avec son mari et ses trois enfants. En attentant peut-être
de recréer une entreprise. "La création est quelque chose
de fabuleux, confie-t-elle, ça a été mon expérience
la plus satisfaisante, la plus enrichissante et la plus complète."
Ses
idées sur le management
Il y a encore trop d'immobilisme par le haut dans les entreprises françaises,
trop de formules de parachutage par le haut, ce qui crée de l'immobilisme
en dessous. Le principe d'une pyramide des âges est de libérer
le haut pour faire monter les jeunes. On n'est pas encore prêt à
confier des responsabilités selon les compétences réelles
de business et non selon le pedigree. Il y a aussi le problème des chaises
musicales, le système tourne car il n'y a pas de véritables sanctions.
L'establishment a un esprit de corps.
Le
niveau de contrôle des procédures s'est extraordinairement complexifié
ces dernières années, ce qui complique le processus de décision
et de production. On gère de moins en moins intuitivement. Le contrôle
n'est pas incompatible avec l'initiative. Au contraire, plus il y a d'autonomie,
plus il faut de contrôle. Il faut définir une délégation
forte avec une courroie de rappel qui permet de contrôler ce qui se passe.
D'une manière générale, tous les secteurs sont soumis à
une notion plus aiguë de valeur pour l'actionnaire, ce qui induit des changements
de comportements.
Les quadras ne sont pas forcément plus réceptifs que les quinquas,
mais il est plus facile de faire sa révolution culturelle à 40
ans qu'à 50. Plus on découvre tard de nouvelles pressions, moins
on a de chance de réagir. Certaines personnes ne peuvent plus retrouver
la disponibilité d'esprit et le ressort nécessaire. Les gens des
marchés sont peut-être mieux préparés car ils ont
l'habitude de prendre des décisions rapidement alors que dans des secteurs
industriels où les décisions sont plus collégiales, on
peut vivre sans prendre de décisions difficiles. Les marchés vont
tellement vite qu'on est contraint par le choix, cela force à décider
vite.
Décider, c'est la clé du management, c'est ce qui détermine la capacité de changement. Qu'une décision soit bonne ou mauvaise, on ne le sait qu'après. L'essentiel c'est de bouger. Quand on voit l'industrie bancaire française, elle a été immobile trop longtemps.