Banque-Finance UK > Rédigé le 02 février 1996
La City pompe à finance :
Pourquoi Londres est la capitale financière de l'Europe.

Chiffres
Sept heures trente du matin, il fait encore nuit dans la City quand le London international financial futures exchange, le Liffe, ouvre ses portes. 2500 traders aux vestes bariolées franchissent les tourniquets à cartes magnétiques pour s'engouffrer dans cet entrepôt hyper-informatisé de 3000 mètres carrés. Créé en 1982, le Liffe s'est hissé au troisième rang mondial des marchés à termes, avec 133 millions de contrats échangés en 1995, représentant un volume de transactions de 128 milliards de livres sterling par jour (voir le tableau Comparaison de la City et de Paris en quelques chiffres). Portant une casaque à rayures bleues et blanches, Paul Clarke est un heureux bénéficiaire du succès financier de la City. Entré en Bourse à dix-sept ans, sans diplôme, il dirige aujourd'hui une équipe de trente négociateurs pour le courtier Gerrard National Intercommodities, le plus gros employeur sur le parquet du Liffe.

600 000 emplois liés à la finance dans le grand Londres
L'emploi est la première richesse créée par la City. Plus de 20 000 personnes travaillent directement ou indirectement pour le Liffe. Au total, les services financiers et assimilés (assurance, immobilier, comptabilité, etc.) ont créé 150 000 emplois depuis 1981 et occupent aujourd'hui plus de 600 000 personnes dans l'agglomération londonienne. Parmi eux on compte d'ailleurs des milliers de Français. Jacques Rambosson est de ceux là. Après avoir dirigé la branche britannique de la BNP et l'association des banques étrangères en Angleterre, il est passé de l'autre côté de la barrière. Devenu directeur pour l'Europe de BZW, une banque d'affaires filiale de la Barclays bank, il résume la philosophie de la City: «peu importe la nationalité des banques, tant que les affaires se font à Londres, y créent des emplois et rapportent de l'argent».

La tempête qui a secoué la City en 1995 n'arrête pas la prospérité financière. La faillite spectaculaire de la banque Barings et son rachat pour une livre symbolique par ING, la banque postale hollandaise; la mainmise de la Société de Banque Suisse sur la banque Warburg et le rachat de sa concurrente Kleinwort Benson par la Dresdner Bank allemande troublent à peine le flegme des gentlemen aux parapluies noirs. Ici, on ne mélange pas le chauvinisme et les profits. «Plus de 70% des membres de notre marché sont sous contrôle étranger, explique Jack Wigglesworth, président du Liffe. La force de la City est son internationalisation. Le secteur financier n'est pas dépendant de l'économie britannique, du coup les établissements financiers nationaux ne sont ni protégés, ni favorisés par rapport aux étrangers.»

Du coup, l'argent afflux. Les clients étrangers du Liffe ont généré un excédent de 750 millions de livres dans la balance des paiements britannique. Et avec un excédent commercial de 16 milliards de livres sterling (120 milliards de francs), le secteur financier est la seconde source de devises pour la Grande Bretagne, juste derrière le pétrole de la mer du Nord. Dans son ensemble, le secteur financier pèse autant dans l'économie britannique que tout le secteur manufacturier, soit 24% du PNB. Et à force d'être soumises à une concurrence forcenée, les banques britannique qui ont survécu sont devenues de loin les plus puissantes d'Europe. La Barclays bank et la HSBC-Midland, affichent ainsi respectivement des bénéfices gigantesques de 8 et 26 milliards de francs en 1995. Un exemple cruel pour les banques françaises perdues dans le puits sans fond de leurs pertes immobilières.

Gilles Pouzin

Comparaison de la City et de Paris en quelques chiffres
City (rang mondial) Paris (rang mondial)
Capitalisations boursières fin 1995 1300 milliards de dollars (3ème) 500 milliards de dollars (5ème)
Transactions sur actions en 1994 866 milliards de dollars (2ème) 170 milliards de dollars (7ème)
Marché à terme des changes 301 milliards de $ par jour (N° 1) 37 milliards de $ par jour (8ème)
Marché à terme des taux d'intérêt 297 milliards de dollars par jour (N°1) 109 milliards de dollars par jour (4ème)
Source : FIBV/BRI
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