l'Edito du dimanche > Rédigé le 6 mai 1999
Mariage des Bourse européennes :
Que c'est laborieux.

Le projet de fusion des huit principales Bourses européennes, annoncé mardi dernier, permettra-t-il enfin d'acheter des actions allemandes, italiennes ou espagnoles, aussi facilement que des actions françaises? Pour l'instant ce n'est pas encore possible. Cela semblerait pourtant logique. L'intérêt de l'euro, disait-on avant sa naissance, est de permettre aux épargnants de diversifier leurs placements sur l'ensemble du territoire européen sans se soucier des frontières et des barrières monétaires. Puisque les pays européens ont une économie de plus en plus homogène, acheter des actions d'un pays plutôt que celles d'un autre pour des raisons de nationalité n'a donc plus aucun sens. Ce serait aussi absurde que d'investir en actions alsaciennes sans pouvoir diversifier son portefeuille en actions bretonnes.

Dans cet esprit, l'isolement des Bourse européennes est un anachronisme et leur fusion va dans le sens de l'Histoire. Pourtant, depuis près d'un an, les annonces de fusion des Bourses du Vieux continent cachent mal leur incapacité à concrétiser ce projet. La première alliance entre la Bourse de Francfort et celle de Londres, annoncée en juillet dernier, avait beaucoup agacé les responsables de la Bourse de Paris. En riposte, d'autres alliances ont été étudiées jusqu'à ce que les huit principales Bourses européennes se réconcilient spectaculairement cette semaine.

La Bourse de Paris et celles de Londres, Francfort, Milan, Madrid, Amsterdam, Zurich et Bruxelles ont donc officiellement signé un protocole d'accord qui "confirme leur volonté de travailler en commun". Cette déclaration d'intention n'est malheureusement accompagnée d'aucun calendrier précis. Il ne sera donc toujours pas possible, avant de longs mois, d'acheter à la Bourse de Paris des actions de Deutsche Telekom, de Telecom Italia ou d'Electricidade de Portugal.

Qu'à cela ne tienne! Pendant que les capitales du Vieux continent se disputent, la Bourse européenne, elle, se développe tranquillement mais ailleurs, aux Etats-Unis. Et les épargnants français y ont déjà accès grâce à Internet. De plus en plus d'intermédiaires permettent en effet d'investir sur la Bourse américaine aussi facilement qu'à la Bourse de Paris. Par ce biais, les épargnants français ont accès à plus de 230 sociétés européennes, alors que seules quelques unes d'entre elles sont côtées à la Bourse de Paris.

D'ici quelques mois, quand ces nouveaux intermédiaires se développeront en France, les épargnants qui n'ont pas d'accès à Internet pourront même acheter ces valeurs européennes directement sur Minitel. Pour que l'Europe boursière devienne une réalité, il ne restera plus alors qu'à offrir aux actions européennes les mêmes avantages fiscaux qu'aux actions françaises, c'est à dire l'exonération d'impôts qui est pour l'instant réservée aux plans d'épargne en actions françaises.

Gilles Pouzin

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