Prévisions d'Experts > Mai - Juin 1998


Montgomery Securities et Franklin Templeton sur les télécom-26 juin 1998

Après les fusions géantes qui ont secoué la finance américaine, l'OPA de 37 milliards de dollars d'ATT sur le réseau câblé TCI ouvre de nouvelles perspectives aux industries de télécommunications.

Les particuliers sont l'enjeu des réseaux
"L'opération ATT/TCI bénéficie dans un premier temps aux opérateurs de réseaux câblés, explique Franck Prissert, courtier chez Montgomery Securities à San Francisco. Mais à terme elle créera de la concurrence dans la téléphonie locale." Il conseille de s'intéresser aux propriétaires des réseaux câblés urbains, comme Winstar et Adelphia Communications, à travers sa filiale Hyperion, qui sont la clé d'accès aux foyers américains. Selon Franck Prissert, le rapprochement des télécom et des réseaux câblés entraînera la modernisation de ces derniers pour y faire passer plus de données. "Le premier bénéficiaire des investissements d'ATT sera son fournisseur habituel, Lucent, explique-t-il. Mais cela forcera les autres réseaux à accélérer leur rénovation." Ce saut technologique favoriserait Nortel ou Tellabs, dont la technologie Wave Division Multiplexing permet d'augmenter de débit d'information des réseaux câblés.

Franck Prissert estime enfin que l'OPA d'ATT donne plus de crédibilité à la convergence des communications poussée par l'arrivée d'Internet (Téléphone-Télévision-Ordinateur). Cela profiterait aux fabricants de décodeurs sophistiqués (les set-top box) comme General Instrument, et aux fournisseurs de programmes, en augmentant leurs débouchés. Il croit ainsi aux bonnes perspectives de Liberty Media. Cette filiale de TCI qui sera dirigée par l'actuel président du groupe, John Malone, est un holding contrôlant des chaînes connues comme Discovery Channel.

Les télécom européennes sont en ébullition
"Je suis très optimiste sur les valeurs de télécommunications européennes", déclare Ian Link, gestionnaire spécialiste du secteur chez Franklin Templeton à San Matéo. Elles croissent plus vite que les autres services publics et sont aussi défensives. "Les sociétés de télécom sont isolées de la crise asiatique, estime Ian Link, car les gens ne réduisent pas leurs communications, même avec les téléphones portables car ils en sont drogués." Aux Etats-Unis, il investit dans des valeurs très internationalisées comme AirTouch, une compagnie de téléphonie mobile qui a des licences de réseaux cellulaires en Allemagne, en Espagne, en Italie, en Suède et au Portugal.

Parmi les opérateurs européens, Ian Link apprécie Deutsche Telecom et Telefonica, plus pour leurs activités cellulaires que pour leur offre traditionnelle qui s'ouvre à la concurrence. "Malgré la hausse nous gardons nos actions de Telecom Italia Mobile ou de l'Espagnol AirTel", confie-t-il après avoir participé à leur privatisation. Ian Link investit également dans Hellenic Telecom, l'opérateur grec privatisé en 1996 qui a ouvert davantage son capital au premier trimestre; Stet Hellas, le réseau cellulaire grec privatisé en mai; et Matav l'opérateur hongrois privatisé au premier trimestre, en attendant la prochaine privatisation de Poland Telecom.


Montgomery Asset Management. Risques émergents et europtimisme-19 juin 1998

Montgomery Asset Management est une société de gestion de San Francisco affiliée au groupe Commerzbank. Elle gère 11 milliards de dollars dont 36% en actions non-américaines. Oscar Castro est le directeur du comité d'investissements chargé des actions internationales.

Les racines du mal asiatique
La crise asiatique a deux racines: le Japon et les pays émergents. La tradition japonaise consistait à conquérir des parts de marché sans souci de rentabilité, ce qui était possible grâce à l'excès de capitaux disponibles. Selon Oscar Castro, la disparition de l'abondance financière a mis ce modèle sous pression. Et les pays émergents d'Asie ont trop construit et se sont retrouvés en surcapacité sans pouvoir rembourser leurs dettes. "Ces problèmes ne sont pas résolus et risquent de s'aggraver si les derniers bastions de croissance de la zone, la Chine et Hong Kong, déclenchent une nouvelle crise, prévient Oscar Castro. La région est instable et sans visibilité. Nous ne réinvestirons pas massivement en Asie tant que les deux pôles de la crise ne seront pas résolus."

Un dilemme pour investisseurs
Oscar Castro reste très inquiet des conséquences du mal asiatique. "Une nouvelle crise dans cette région entraînerait une surenchère d'offre de tout ce qu'elle peut produire sans qu'il y ait de demande pour l'acheter, estime-t-il. Les multinationales occidentales seraient doublement frappées par ce dumping et par la disparition de leurs marchés d'exportation." Selon lui, cela déclencherait une forte volatilité boursière. La crise se répandrait autour du monde et les investisseurs paniqueraient. "D'un autre côté, on peut acheter des actifs très dépréciés dans la région la plus peuplée du monde, confie-t-il. L'opportunité est évidente mais très nuageuse. Allez à la pêche en espérant ne pas prendre un poisson mort." Montgomery investit ainsi 14% de son portefeuille international au Japon en misant sur des groupes qui améliorent leur gestion, comme Sony, Bridgestone et Kirin Brewery, ou sur des sociétés acculées à se restructurer pour survivre, comme Nissan ou les banques Sumitomo et Asahi.

Le refuge européen
"Les investisseurs financiers resteront à l'écart de l'Asie et du Japon et se réfugieront en Europe", prédit Oscar Castro. Montgomery investit ainsi 75% de son portefeuille international en Europe alors que celle-ci ne représente que 55% de l'indice mondial hors-USA. Oscar Castro croit que l'UEM fera de l'Europe une Nouvelle Amérique. "L'Union a une population 13% supérieure aux USA sur un territoire 25% plus petit avec un PIB 10% inférieur, nous pensons que l'euro créera des synergies et des opportunités incroyables", affirme-t-il. A court terme il croit surtout que l'Europe est la moins touchée par le mal asiatique. "L'envolée des valorisations nous inquiète, admet-il, mais moins qu'aux Etats-Unis. La visibilité est bonne et la demande d'actions reste supérieure à l'offre." Il privilégie les services publics, avec Telefonica, Railtrack, Mannesmann ou Vivendi, et les produits de consommation, avec Unilever, Glaxo ou Novartis.


Abby Cohen, Wells Fargo et Garzarelli parient sur Wall Street-12 juin 1998

Non seulement les Européens commettent invariablement la même erreur en sous-estimant la solidité de Wall Street, mais ils sanctionnent aussi à tort leurs propres Bourses à chaque éternuement des actions américaines.

Un pas en arrière, deux pas en avant
La Bourse américaine monte en escalier, explique Abby Cohen, l'oracle de Goldman Sachs la plus respectée à Wall Street. "Les avancées significatives, les hautes marches, sont suivies par une phase de trading, la partie plate de la marche", diagnostique-t-elle. Cette progression semble se répéter d'elle même après des gains rapides (+15% au premier trimestre, +30% de fin octobre à fin avril). Mais Madame Cohen n'est pas impressionnée par les escaliers: "Il n'y a pas eu de changements dans nos vues fondamentales, affirme-t-elle. Nous nous attendons à une poursuite de l'expansion économique et bénéficiaire actuelle jusqu'à la fin de 1999." Une précaution qu'elle justifie seulement par le fait que ses prévisions ne s'étendent pas encore à l'an 2000. Sur la base de l'inflation et des profits d'entreprise prévus par Goldman Sachs, Abby Cohen estime que l'indice Dow Jones devrait atteindre 9 300 d'ici la fin de l'année, soit 6,7% au-dessus du creux de vendredi dernier. Son allocation d'actifs reste 65% d'actions, 25% d'obligations, 5% de trésorerie et 5% de matières premières.

Wall Street n'est pas exubérante
Un des éléments qui rassurent Gary Schlossberg, l'économiste de la banque Wells Fargo, est que les investisseurs américains sont bien moins exubérants que ce que l'on entend souvent. "La prudence se reflète à la fois dans les récentes enquêtes auprès des gestionnaires de fonds et dans les flux d'investissements en actions des épargnants, explique-t-il. La confiance des gestionnaires est pratiquement au plus bas depuis plus d'un an, leur ratio de trésorerie étant revenu au plus haut atteint vers la fin de 1996. Et les souscriptions de mutual funds en actions sont pratiquement retombées au plus bas depuis cinq mois." Cette prudence est pour une bonne part responsable de la stagnation enregistrée par Wall Street au second trimestre. Elle épargne aussi à la Fed la délicate mission de refroidir l'exubérance irrationnelle.

Garzarelli ne vois-tu rien venir?
Elaine Garzarelli avait gagné sa réputation en prédisant le krach de 1987. Elle l'avait sérieusement écornée en prédisant le krach de 1996 qui n'a jamais eu lieu. Reconnaissant ses erreurs, l'ancienne gourou de Shearson et de Lehman a changé quelques données dans son modèle quantitatif secret qui est aussitôt redevenu optimiste début 1997. Depuis, plus de krach à l'horizon. Elaine Garzarelli voit l'indice Dow Jones grimper à 9 700 avec des corrections limitées entre 4% et 7%, soit 5,5% en moyenne. Lui obéissant au doigt et à l'oeil, l'indice Dow Jones vient justement de perdre 5,4% depuis son record de 9 212 atteint en avril. Si les prévisions d'Elaine Garzarelli se révèlent à nouveau infaillibles, le marché haussier pourrait mener l'indice sacré jusqu'au sommet de 11 500 en l'an 2000.


Salomon sur l'Europe. Morgan Stanley contre le yen. Canyon pour la Russie-05 juin 1998

Quand le bâtiment va...
L'économie européenne s'accélère, le chômage chute et la confiance renaît, c'est la période traditionnelle pour acheter des actions cycliques, explique Mark Howdle, responsable de la stratégie chez Salomon Smith Barney. Mais le cycle des années 90 est différent. Selon lui les grands groupes européens sont plus impliqués dans l'économie mondiale, notamment en Asie. "Le secteur des matériaux de construction est une exception", confie-t-il. En dehors des grands cimentiers c'est un secteur très européen. La construction en Europe a été au plus bas pendant l'essentiel de la décennie et ses trois composantes -logement, immobilier commercial et travaux publics- se redressent toutes ensembles. "C'est un secteur où nous sommes surinvestis", conclut Mark Howdle. Pour le matériel électrique, la construction mécanique, la chimie et la métallurgie, Salomon considère que la reprise européenne ne compensera peut-être pas la faiblesse asiatique et les effets négatifs d'un euro de plus en plus fort.

Les menaces du yen
A 14O yens pour un dollar, le yen est au plus bas depuis sept ans et en chute de 45% par rapport à son record du printemps 1995. "Le monde semble résolu à laisser baisser le yen pour relancer l'économie japonaise", estime Steve Roach, l'économiste en chef de Morgan Stanley, ce qui représente selon lui trois risques. 1- Un yen faible n'incite pas les entreprises japonaises à se restructurer. 2- Ce serait considéré comme une tentative de relancer l'économie par les exportations en gagnant des parts de marché sur les partenaires commerciaux du Japon qui riposteraient. 3- Un yen faible déclencherait une nouvelle série de dévaluations, à commencer par la Chine. Steve Roach ne croit pas à la concurrence directe entre le yen et le reminbi car leurs exportations sont assez différentes, mais la contagion pourrait se transmettre par le won coréen et le dollar de Taiwan. Ravi Bulchandani, l'expert des devises chez Morgan Stanley à Londres, croit pour sa part que le yen continuera à se déprécier au moins jusqu'à 150 ou 160 yens pour un dollar en 1998-99.

Opportunités émergentes
Plus les menaces sont effrayantes, plus les opportunités sont attrayantes si les catastrophes sont évitées, explique Bruce Schoenfeld, spécialiste de la dette des pays émergents pour le hedge fund Canyon Capital, à San Francisco. "Le gouvernement russe vient d'émettre un emprunt en dollar sur cinq ans de 1,25 milliard avec un rendement 6,5% au-dessus des emprunts américains, confie-t-il. Je pense que c'est intéressant car l'inflation est de 8% à 10% et les Américains et les Européens ne veulent pas d'une chute du rouble qui sèmerait le chaos en Russie." L'émission, dirigée par Goldman Sachs, a été sursouscrite. Canyon Capital parie aussi sur les emprunts en dollar de l'Etat coréen dont le rendement est monté à 4,25% au-dessus des emprunts américains. Ce fonds, qui utilise des produits dérivés pour limiter ses risques, mise également sur l'Ukraine, le Brésil, la Bulgarie, l'Argentine, la Côte d'Ivoire et la Roumanie.


Ralentissement et taux US (Chase, Fargo). Valeurs Internet en péril (Paine Webber)-29 mai 1998

Effet retard de la crise asiatique
L'industrie américaine a calé et l'impact du choc asiatique n'en est qu'à son début, observe le département des études de la Chase Manhattan. La croissance de la production industrielle a chuté d'un rythme annuel de 7,2% au dernier trimestre 1997 à 1% au premier trimestre 1998. Le taux d'utilisation des capacités industrielles est déjà redescendu à son niveau de 1993. "La décélération a été généralisée et de nouveaux retraits sont à attendre", préviennent les économistes de la Chase. L'activité industrielle sera un élément crucial de transmission de la crise asiatique aux Etats-Unis. Selon la Chase, l'impact du déficit commercial sur la production américaine est momentanément atténué par le stockage, qui est trois fois plus élevé que le niveau soutenable normal. A elle seule, la croissance des stocks a représenté 1,5% de croissance du PIB au cours des deux derniers trimestres. "Au fur et à mesure que le stockage retrouvera un rythme normal, une contraction du secteur manufacturier sera une possibilité réelle", estime la Chase.

Soulagement pour les taux d'intérêt
L'annonce du déficit commercial record de 13 milliards de dollars en mars est aussi un soulagement pour les taux d'intérêt, estime Gary Schlossberg, l'économiste de la banque Wells Fargo. "Le déficit commercial pourrait plafonner la révision des statistiques de croissance du premier trimestre à 4,5% au lieu des 5% attendus auparavant", explique-t-il. Selon lui cette source de ralentissement extérieure a rassuré les marchés de taux d'intérêt qui s'inquiétaient d'une surchauffe de l'économie américaine. "Les investisseurs obligataires seront aussi encouragés par les perspectives d'une nouvelle désinflation déclenchée par la rechute des cours du pétrole", estime Gary Schlossberg. Les cours du pétrole resteront vulnérables à de nouvelles baisses jusqu'à la prochaine réunion des pays producteurs, fin juin. Il en conclut que l'inflation américaine pourrait encore baisser dans les prochains mois.

Sélection naturelle sur Internet
De nombreuses sociétés fondées sur le développement d'Internet ne survivront pas, explique Edward Kerschner, directeur de la stratégie d'investissement chez le courtier Paine Webber. "L'histoire montre que les risques sont importants quand on investit dans une jeune industrie", prévient-il. Selon Paine Webber, sur 485 sociétés créées dans le secteur automobile entre 1900 et 1908, 262 avaient fait faillite en 1908. Les actions de fabricants d'ordinateurs personnels se sont envolées en 1982-83, mais elles ont reperdu en moyenne 50% en 1984 tandis que les leaders d'aujourd'hui -Compaq, Dell et Gateway- n'étaient pas encore cotés. Pour Paine Webber, ces expériences suggèrent quatre risques. 1: Même la meilleure société peut être trop chère. 2: Même un leader peut ne pas survivre. 3: Des sociétés médiocres viennent sur le marché quand la demande y est. 4: Les boom high-tech surviennent quand les cycles économiques et boursiers favorisent une industrie, mais ces tendances peuvent changer rapidement.


Wall Street surévaluée mais moins vulnérable aux taux (Morgan Stanley, Salomon)-22 mai 1998

Wall Street est surévaluée par rapport aux obligations
"Qu'est-ce qui pourrait faire dérailler la prospérité apparemment sans fin des marchés financiers?", s'interroge Steve Roach, l'économiste en chef de Morgan Stanley. Selon lui, le cas des Etats-Unis est assez inquiétant. "Il n'y a pas d'excès significatifs dans l'économie réelle, précise-t-il, mais ils sont nombreux sur les marchés." Selon le modèle d'actualisation des dividendes utilisé par Morgan Stanley, les actions américaines sont actuellement surévaluées de 16% par rapport aux obligations. "Il faudrait que le rendement des emprunts d'état américains chute à 5,25% pour justifier une telle valorisation", estime Steve Roach. Or, selon lui, les rendements obligataires sont déjà trop bas. "Notre analyse de la courbe des taux suggère que les investisseurs parient sur un maintien du niveau actuel des taux de la Fed pendant au moins six mois, explique-t-il. Par ailleurs l'analyse des emprunts indexés sur l'inflation montre que le marché mise sur une inflation contenue entre 0% et 1% sur les cinq prochaines années." Steve Roach en conclut qu'il faudrait que les marchés croient à une inflation encore plus basse, ce qui est selon lui totalement irréaliste, pour justifier le niveau actuel des actions.

Le Japon est le seul marché qui ne paraît pas surévalué aux yeux de l'économiste de Morgan Stanley. "Durant toute ma carrière je n'ai jamais vu une telle unanimité sur un marché ou un concept, explique Steve Roach. Tout le monde est vendeur du yen et de l'indice Nikkei, ce qui suggère que les mauvaises nouvelles sont maintenant dans le marché et qu'il n'y a pas besoin de beaucoup de bonnes surprises pour déclencher un rebond."

Mais les actions survivraient à une hausse des taux
Même si les taux ne baissaient plus et se mettaient au contraire à remonter, John Manley, responsable de la stratégie chez Salomon Smith Barney, est prêt à parier que Wall Street peut battre de nouveaux records. Il remarque d'abord que les trois hausses violentes de taux d'intérêt enregistrées depuis 1994 n'ont pas empêché les actions de grimper. En 1994, les taux d'intérêt obligataires sont montés de 6% à plus de 8%. Début 1996, les taux sont rapidement remontés de 6% à 7,25%. Et début 1997 les taux sont montés de 6,5% à plus de 7% après le relèvement de 0,25% du taux des Fed funds. Dans chaque cas, les actions ont chuté de 8% à 12% avant de regagner de nouveaux sommets "Le fait que de telles réactions aient déjà eu lieu ces dernières années pourrait en fait rendre la Bourse moins sensible aux mouvements de taux d'intérêt à long terme", explique John Manley. Au cours des cinquante dernières années, les rendements obligataires étaient déjà remontés nettement au dessus de leurs plus bas quand les actions ont affiché leurs derniers records. "Cela signifie que les actions ont continué à monter dans des périodes où les taux d'intérêt montaient, conclut-il. Cela pourrait être le cas si la Fed ne restreint pas la liquidité de façon significative dans les trois mois qui viennent."


Dresdner RCM parie sur l'euro et les Bourses européennes-15 mai 1998

Dresdner RCM Global Investor, qui gère 65 milliards de dollars, est né du rachat par la Dresdner Bank de l'Américain RCM, de Thornton et Kleinwort Benson, à Londres, et du Français BIP Gestion. Deux experts de l'euro étaient en téléconférence vendredi avec le siège de Dresdner RCM, à San Francisco.

Victoire de l'euro
"Le sommet de Bruxelles a été un non événement pour les marchés, explique David Felder, responsable des obligations européennes chez Dresdner RCM à Londres, car il a été perçu comme une confirmation de la convergence économique en cours." Les marchés européens entrent selon lui dans une période de stabilité totalement à l'opposé des turbulences du début de la décennie. "Pendant les deux ou trois premières années de l'UEM je ne pense pas que les traders défieront la banque centrale européenne, estime-t-il, étant donné que tous les gouvernements la soutiendront et qu'ils seront aidés par la reprise économique." Dans ces conditions, l'euro remplacera bien le mark et les dix autres monnaies constituant l'UEM le 1er janvier 1999, sans qu'aucun marché parallèle ne puisse survivre.

Pour David Felder, le plus intéressant sera le pilotage de la politique monétaire en fonction des différents rythmes de croissance et des différentes sensibilités des économies aux taux d'intérêt. "Le premier test sera de surveiller les taux d'intérêt allemands, dit-il. Nous pensons que la convergence des taux à court terme se fera autour de 4%, ce qui devrait être une hausse de taux gérable pour l'économie allemande." A un horizon de deux ans, il ne voit pas les taux courts européens monter à plus de 4,5% étant donnée l'absence d'inflation. Les taux d'intérêt à long terme resteront néanmoins dépendants du marché obligataire américain.

Nouvelle ère des Bourses européennes
"Les écarts de taux entre les emprunts d'état européens offrent peu de diversification. A l'inverse, la différence entre les Bourses européennes est plus importante pour les actions", explique Jan Mantel, directeur des investissements en actions de Dresdner RCM à Londres. L'euro entraînera selon lui des déplacements de capitaux gigantesques. "En Espagne par exemple, la capitalisation boursière est trop concentrée sur les services publics ou les banques, explique-t-il. S'ils n'ont plus de risque de change, les investisseurs voudront se diversifier en valeurs pharmaceutiques françaises ou en biens d'équipement allemands."

La refonte des Bourses européennes attirera aussi plus d'investisseurs étrangers. "Les épargnants américains sont des "acheteurs d'histoires", explique Alan Martin, directeur du développement de Dresdner RCM à San Francisco, ils investissent en fonction de ce qu'ils lisent dans les journaux." Dès qu'ils auront des signes que l'euro est plus un succès qu'un échec, Dresdner RCM estime que les Américains augmenteront leurs investissements européens. "Les actions européennes sont extrêmement chères par rapport à leurs standards historiques, conclut Jan Mantel, mais on a vu aux USA que les actions peuvent rester chères et monter très longtemps tant que des capitaux s'investissent en Bourse."


Salomon parie sur la France. Morgan Stanley sur une rechute de l'Asie. Pas de krach de l'an 2000-07 mai 1998

Pas d'arrêt à la hausse des Bourses européennes
Pour Mark Howdle, responsable de la stratégie chez Salomon Smith Barney, les Bourses européennes monteront plus haut mais plus lentement. La croissance des bénéfices des sociétés devrait atteindre 13% en 1998, mais cela ne suffira pas à propulser les actions, car Mark Howdle s'attend en contrepartie à une hausse des taux d'intérêt qui freinera la hausse boursière. Selon lui ce sont les flux de capitaux et les OPA qui soutiendront les actions. "Bien que nous ne prévoyons qu'une progression moyenne de 9% des Bourses européennes d'ici douze mois, elles pourraient facilement atteindre des niveaux plus élevés d'ici là, prédit-il. Parmi les grands marchés nous privilégions l'Italie, l'Espagne et la France qui seront probablement les bénéficiaires de la convergence des taux d'intérêt, des flux de capitaux et des acquisitions de sociétés." Il estime que les Bourses les plus sensibles au dollar, comme l'Allemagne, la Hollande et la Suisse, seront désavantagées par l'affaiblissement du billet vert. L'Autriche et l'Irlande auraient les meilleurs potentiels parmi les plus petits marchés.

Rechute des taux d'intérêt et des monnaies asiatiques
Les actions coréennes ont replongé de 32% depuis leur plus haut de début mars tandis que le won grimpait de 15% face au dollar. Les actions thaïlandaises ont reperdu 28% depuis début février tandis que le baht regagnait 26%. Pour Tim Condon, économiste de Morgan Stanley à Hong Kong, cette divergence ne peut pas durer. "Aujourd'hui, les banquiers centraux asiatiques ont opté pour des taux élevés et des monnaies fortes, explique-t-il. En Corée, en Thaïlande et en Indonésie, la raréfaction du crédit fait partie des programmes du FMI." Tim Condon estime qu'une prolongation de cette politique entraînerait une spirale déflationniste désastreuse. Du coup, il parie sur une forte baisse des taux d'ici la fin de l'année pour soulager l'économie. "Les taux pourraient redescendre à leur niveau d'avant la crise, prédit-il, et les devises ont probablement des chances de se déprécier." Selon ses prévisions, la roupie indonésienne et le won coréen reperdront environ 20% face au dollar d'ici fin 1998, le dollar de Singapour et le peso philippin abandonneront 10%, le ringgit malaysien 8,5%, et le baht 12%.

La controverse de l'an 2000
Les pronostics d'une récession déclenchée par les problèmes informatiques de l'an 2000 sont contestés. Après qu'Edward Yardeni, l'économiste en chef de la Deutsche Morgan Grenfell, ait averti la planète de ce danger, Edward Kerschner, l'économiste de Paine Webber, écarte totalement cette hypothèse. "Les problèmes informatiques pourraient altérer les facturations téléphoniques, pas les communications, explique-t-il. Les dysfonctionnements de l'an 2000 pourraient au pire ralentir l'économie mais pas la renverser." Pour Edward Kerschner les problèmes de l'an 2000 seront réglés à temps et les investissements en nouveaux ordinateurs plus productifs engendreront des "dividendes de l'an 2000".


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