Prévisions d'Experts > Mai - Juin 1999


Mystères japonais. Le printemps de Hong Kong - 23 juin 1999

Reprise gonflée
La reprise de l'économie japonaise sur un rythme annuel de 7.9% de croissance au premier trimestre laisse les économistes perplexes. Pour Karin Li, de la banque Morgan Stanley, le rebond de la demande domestique est incontestable mais elle est soutenue par une politique de relance qui risque de s'essoufler. "L'augmentation des investissements, principalement des petites et moyennes entreprises, est liée aux mesures de stabilisations du système financier et au système gouvernemental de garanties des crédits", explique l'économiste. Mais 80% des fonds alloués à ces garanties de crédits ont déjà été utilisés, s'inquiète-t-elle. "A moins que le gouvernement poursuive cette politique avec des mesures de relance fiscales supplémentaires, la demande du secteur privé a des chances de s'affaiblir à nouveau", prédit Karin Li.

Paradoxe monétaire
La reprise inattendue du Japon au premier trimestre a par ailleurs eu un effet paradoxal sur la politique monétaire japonaise. "L'annonce d'une croissance plus forte que prévue a renforcé le yen, reconnaît Karin Li. Mais l'intervention de la Banque du Japon pour le faire rebaisser a trahi ses inquiétudes vis-à-vis de l'impact négatif que le yen fort pourrait avoir sur la reprise, ce qui a été interprêté comme un manque de confiance dans la reprise économique." L'intervention de la Banque du Japon est d'autant plus déstabilisante qu'elle semble mener deux politiques contradictoires. La Banque du Japon a en effet réduit son bilan de 11.5% pendant la première semaine de juin, essentiellement en vendant des emprunts d'Etat japonais. "La raison la plus probable est que la Banque du Japon ait voulu dégonfler la bulle du marché obligataire avant qu'elle n'explose", explique Robert Alan Feldman, économiste chez Morgan Stanley. Il considère néanmoins que cette politique menace la reprise en étant directement responsable du renforcement du yen et de la hausse des taux d'intérêt. "Le ministère des finances ne peut pas intervenir avec succès pour endiguer la hausse du yen si la Banque du Japon resserre sa politique monétaire", conclut-il.

Le printemps de Hong Kong
Les difficultés de la croissance chinoise et les risques toujours possibles d'une dévaluation du yuan ne troublent pas la reprise de la Bourse de Hong Kong. En repassant au dessus du cap des 14 000 points l'indice Hang Seng a regagné plus de 100% par rapport à son plus bas de l'automne 1998 et il a pratiquement effacé les pertes occasionnées par la crise asiatique de l'automne 1997. Les dégâts de la crise ne sont pourtant pas encore totalement réparés. "Les prévisions de profits se sont arrêtées de chuter mais il leur reste encore à montrer des signes d'amélioration, explique Nigel Tupper, analyste chez Merrill Lynch. Ce qui indiquerait que la reprise n'est pas encore généralisée." Les conglomérats les plus solides et les mieux gérés ont pourtant su tirer leur épingle du jeu et regagner la faveur des investisseurs. "Hutchison semble être le plus en harmonie avec ce que nous considérons comme des critères de succès pour le futur", estime Christine Leung, analyste chez Merrill Lynch à Hong Kong. Le holding du milliardaire chinois Li Ka Shing ne se contente pas d'être le leader mondial dans les services portuaires en terme de taille et de réseau, note la banque, mais il est aussi reconnu comme l'un des meilleurs, avec son propre logiciel d'optimisation de la gestion des containers. Après avoir réalisé une belle plus-value en réduisant sa participation dans l'opérateur de téléphonie mobile britannique Orange, Hutchison pourrait par ailleurs prendre pied dans la téléphonie cellulaire américaine. Merrill Lynch s'intéresse également à Swire qui devrait bénéficier du redressement de sa participation dans Cathay Pacific et de la reprise de l'immobilier commercial attendue pour l'an prochain.


Contrastes financiers : tout ce qui brille n'est pas de l'or - 18 juin 1999

L'or en panne
Le marché de l'or reste largement dominé par un sentiment négatif en dépit du fait que la demande fondamentale pour le métal précieux reste ferme, estime David Hall, spécialiste de l'or chez Merrill Lynch. "Nous sommes clairement dans un marché baissier où les bonnes nouvelles sont rares, poursuit-il. Le fait que la demande d'or dépasse la production et que les quatre banques centrales qui possèdent le plus d'or ne veuillent officiellement pas en vendre est éclipsé par des effets d'annonces comme la vente de 300 tonnes d'or par la Banque d'Angleterre, le référendum suisse qui devrait entraîner la vente éventuelle de 1 300 tonnes d'or ou la possibilité que le FMI vende de 150 à 300 tonnes d'or pour alléger la dette des pays pauvres." Au delà de leurs ventes, les banques centrales ont accéléré la chute du métal jaune en prêtant leur or à des courtiers pour exécuter des ventes à découvert sur les marchés à terme. Plus de 80 banques centrales sont ainsi prêteuses d'or aujourd'hui. "L'or prêté par les banques centrales cesse d'être de l'or, de leur point de vue, pour devenir une créance, explique Rex McLennan, directeur financier du groupe minier Placer Dome. Je ne pense pas que les banques centrales comprennent totalement l'étendue du risque de crédit qu'elles prennent en prêtant leur or." Selon lui, l'or ne remontera pas tant que les banques centrales ne réduisent pas leurs prêts d'or.

Wall Street exubérante
Les experts n'osent plus prédire la fin de la surévaluation de Wall Street, ils se contentent de la mesurer. Selon le cabinet IBES, l'écart de surévaluation calculé en comparant les actions et les obligations est monté en début de semaine à 42,7%, contre 37,3% la semaine précédente. "C'est la plus forte surévaluation jamais enregistrée, remarque Joseph Abbott, responsable de la stratégie chez IBES, bien au dessus du pic de 39,8% atteint avant le krach de 1987." Dans le passé, les surévaluations de plus de 10% n'ont généralement pas duré plus de deux à six mois. "La surévaluation de Wall Street est maintenant supérieure au niveau tolérable de 10% depuis vingt-cinq semaines, précise Joseph Abbott, ce qui la rapproche également du record de durée de surévaluation atteint en 1987."

Stratégie défensive
Salomon Smith Barney craint que la volatilité de Wall Street ne continue d'augmenter et recommande de s'intéresser aux valeurs de défense. "L'activité de ce secteur est indépendante des cycles économiques et la croissance du budget de la défense devrait relancer la croissance des ventes, explique la banque américaine. De plus, les valorisations des sociétés de défense sont relativement immunisées contre les mouvements de taux d'intérêt." Selon le dernier sondage effectué par le département de recherche de Salomon, 60% des Américains sont favorables à une augmentation des dépenses d'armement, contre seulement 41% l'année précédente. George Shapiro, analyste chez Salomon, s'attend à ce que l'industrie de la défense américaine voit ses commandes augmenter de 6% par an. Ses valeurs préférées sont Raytheon, fabricant des célèbres antimissiles Patriot, et Litton.


Les tensions du printemps s'accroissent avant l'été - 11 juin 1999

La livre trop forte
La forte hausse de la livre sterling, qui avait gagné 11% par rapport à l'euro depuis le 5 janvier (pour atteindre 10,23 francs, soit 1 euro à 0,64 livres le 4 juin) devenait dangereuse pour l'économie britannique. Selon les calculs de Goldman Sachs, une appréciation de 5% de la livre a en effet les mêmes conséquences sur la croissance qu'un relèvement de 1% de tous les taux d'intérêt. Du coup, la Banque d'Angleterre n'avait guère d'autre choix que de baisser son taux d'intérêt de 0,25% jeudi, à 5%, pour compenser un peu les méfaits de la livre forte. La livre reste cependant trop chère par rapport à son niveau idéal d'entrée dans l'union monétaire en 2002 (à 8,75 francs, soit un euro à 0,75 livres). Dans un premier temps, Goldman Sachs prévoit un repli de la livre autour de 9,50 francs (soit un euro à 0,69 livres). "En moyenne, nous nous attendons à ce que la livre baisse plus fortement que dans les prévisions centrales", reconnaît néanmoins David Walton, l'expert de Goldman Sachs sur le marché de changes.

Risque obligataire persistant
Les obligations américaines ne sont probablement pas sorties de leur phase de faiblesse. "Depuis trois ans nous avons considéré qu'il n'y avait pas de risque de correction boursière majeure tant que les taux d'intérêt n'auraient pas remonté", rappelle Chrisitne Callies, responsable de la stratégie du Credit Suisse First Boston. Depuis huit mois, c'est chose faite. Le rendement des T-Bonds à trente ans est remonté de 1,36%, passant d'un plus bas historique de 4,71% à 6,07% vendredi. "L'inflation supérieure aux prévisions et le fort taux d'utilisation des capacités de productions devraient continuer de pousser les taux d'intérêt jusqu'à 6,25%, estime Christine Callies. C'est suffisant pour déclencher la correction de 10% à 15% que nous attendions." Une fois enclenchée, la correction boursière pourrait même dégénérer. "Si les cours sont poussés vers leur niveau de juste valorisation, la correction boursière pourrait être environ deux fois plus importante que prévue", prévient Christine Callies.

Endettement américain
Même si Abby Cohen, la stratégiste mythique de Goldman Sachs, reste sereine, l'économiste de la banque américaine, Bill Dudley, est préoccupé par les déséquilibres de la croissance. "En 1998, explique-t-il, les entreprises américaines ont accru leur endettement sur les marchés de 438,2 milliards de dollars, soit une hausse de 9%." La plus grande partie de cet argent a financé des rachats d'actions. Pour la cinquième année consécutive, les rachats d'actions ont en effet dépassé (de 262,8 milliards de dollars) les émissions d'actions. Compte tenu de l'absence d'épargne des ménages, le déficit de l'ensemble du secteur privé (épargne moins investissements) devrait dépasser 5% du PIB cette année. "Les ménages semblent d'autant plus vulnérables en cas de correction boursière qu'ils ont des espoirs irréalistes", conclut Bill Dudley. Selon les dernières enquêtes, les petits actionnaires américains espèrent en effet que la Bourse leur rapportera 15% à 20% de gains annuels pendant dix ans.


La baisse de l'euro et la hausse des taux restent au coeur des préoccupations financières - 4 juin 1999

Wall Street en sursis
Le repli de Wall Street depuis son record de début mai a calmé les inquiétudes des experts. Abby Joseph Cohen, la stratégiste de la banque Goldman Sachs, estime maintenant que la hausse des profits des entreprises pourrait faire grimper l'indice S&P 500 à 1 385 points d'ici le printemps prochain. Elaine Garzarelli s'attend pour sa part à voir l'indice Dow Jones atteindre les 12 500 points dans les six mois qui viennent, alors qu'elle était bien moins optimiste le mois dernier. Ed Kerschner, le gourou de Paine Webber, retrouve aussi espoir. "Sur la base de leurs rapports cours/bénéfices, les actions ne sont surévaluées que de 2%, estime-t-il, ce qui établit la juste valeur de l'indice S&P 500 à 1 400 points pour la fin de l'an 2000, et celle de l'indice Dow Jones à 11 500 points." Par précaution, Ed Kerschner a néanmoins recommandé à ses clients de réduire la part des actions dans leurs portefeuilles de 57% à 55%. Ed Yardeni, le stratégiste de la Deutsche Bank, reste de son côté préoccupé. D'après sa dernière mise à jour du modèle d'évaluation de Wall Street utilisé par la Fed, les actions américaines demeurent surévaluées de 38,5%, soit un niveau bien plus élevé que les 34% de surévaluation atteints avant le krach de 1987 et les 25% de surévaluation atteints avant la crise de l'automne dernier.

Euro faible
Une partie du problème que rencontre l'euro est qu'il n'y a pas une seule personne ou une seule institution européenne qui soit réellement responsable de surveiller son niveau par rapport au dollar, explique Ravi Bulchandani, l'expert du marché des changes à la banque Morgan Stanley. Du coup, les autorités monétaires européennes laissent glisser l'euro tout en précisant qu'il a un fort potentiel de hausse. Tant que les responsables européens ne mettront pas davantage l'accent sur cet argument, Ravi Bulchandani estime que l'euro continuera à se déprécier lentement vis-à-vis du dollar. "Le niveau auquel les investisseurs trouveront l'euro attrayant ne se situe probablement pas précisément à 1 dollar (soit 1 dollar à 6,56 francs) mais il n'ira probablement pas non plus en dessous de 0,95 ou 0,90 dollars (soit 1 dollar entre 6,90 francs et 7,29 francs)", prédit Ravi Bulchandani.

Dollar fort
L'euro faible c'est aussi le dollar fort, ce qui devrait tempérer les inquiétudes de la Fed, estime Steve Roach, l'économiste de la banque Morgan Stanley. En effet, l'appréciation du dollar vis-à-vis des autres monnaies réduit le prix des importations américaines, ce qui limite les risques d'une reprise de l'inflation aux Etats-Unis. "Selon nos estimations, l'appréciation de 25% du dollar vis-à-vis des monnaies de ses partenaires commerciaux entre 1995 et 1998 a eu pour effet de réduire l'inflation américaine de 0,5% par an durant cette période", explique Steve Roach. Il estime ainsi qu'un nouveau renforcement du dollar pourrait repousser la nécessité de remonter les taux d'intérêt américains pour endiguer l'inflation.


Les tensions sur les taux d'intérêt menacent Wall Street - 28 mai 1999

Menace obligataire
Le changement de politique de la Fed, qui est passée en mode de resserrement monétaire sans préciser quand elle remonterait ses taux d'intérêt, confirme les inquiétudes du marché obligataire. "Les obligations ne sont pas menacées par une explosion de l'inflation, résume Steve Roach, économiste chez Morgan Stanley. Mais il y a un net changement entre les craintes déflationnistes de l'an dernier et une évaluation plus réaliste du risque inflationniste." Selon Steve Roach, la courbe des taux américaine anticipe maintenant un relèvement de 0,4% des taux de la Fed d'ici cinq à six mois. Mais les dégâts ne sont pas terminés pour le marché obligataire.
"Quand le rendement des emprunts à long terme a atteint son plus bas historique, en octobre 1998 à 4,72%, le marché obligataire anticipait une inflation de 0,6% pour les dix prochaines années, remarque Steve Roach. Aujourd'hui, l'inflation attendue par le marché obligataire, mesurée par l'écart de taux entre les emprunts à dix ans et les obligations indexées sur l'inflation, est remonté à 1,8%." Il y a deux ans, les marchés anticipaient encore 3% d'inflation, ce qui correspondait à l'inflation moyenne aux Etats-Unis sur 40 ans (hors choc pétrolier). Steve Roach ne voit pas les taux remonter à ce niveau tout de suite, mais il estime qu'une anticipation d'inflation de 2,25% serait plus normale et suffirait à faire remonter les taux d'intérêt à long terme à 6,25% d'ici la fin de l'année.

Wall Street vulnérable
La hausse annoncée des taux d'intérêt risque d'accroître encore la vulnérabilité de Wall Street. En franchissant le cap des 11 000 points, l'indice Dow Jones atteignait déjà un niveau de surévaluation de 37%, selon le modèle de Morgan Stanley. "Le seul précédent pour un tel excès était en août 1987, quand le même modèle indiquait une surévaluation de 40%", précise Steve Roach. Et encore, le niveau de surévaluation actuel ne prend en compte que des taux d'intérêt de 5,9%. "Si les taux atteignaient notre objectif de 6,25%, Wall Street pourrait facilement dépasser le seuil de surévaluation atteint il y a douze ans", estime Steve Roach. "Dites ce que vous voulez de ces modèles, prévient-il. Mais sur de longues périodes ils ont très bien marché."

Stratégie défensive
Quand la Fed remontera ses taux d'intérêt, il y aura des gagnants et des perdants, explique Sung Won Sohn, économiste à la banque Wells Fargo. "Les gagnants incluront les biens de consommation de masse, produits alimentaires, boissons, loisirs et tabac, ainsi que les produits de base, comme l'aluminium, le papier, les produits chimiques précise Sung Won Sohn. Les perdants compteront les secteurs sensibles aux taux d'intérêt, comme les services financiers, l'automobile, le logement et les matériaux de construction." Dans cet environnement, rappelle l'économiste de la banque californienne, les profits futurs sont moins sûrs et leur valorisation est calculée avec un taux d'intérêt plus élevé, ce qui pénalise les actions aux rapports cours/bénéfices les plus élevés.


Quand les marchés semblent trop calmes... - 19 mai 1999

"Sell in May and go away!"
A l'heure où les records s'essoufflent, faut-il s'en remettre à ce vieil adage boursier? Oui, répond Ben Jacobsen, professeur de finance à l'université d'Amsterdam, qui a étudié ce phénomène avec son collègue Sven Bourman, économiste chez ING Investment Management. "Sell in May and go away; and buy back on the Derby day", précise même une variante du proverbe en référence à une course de chevaux qui se déroule en septembre. D'après la tradition boursière, les investisseurs auraient ainsi intérêt à vendre leurs actions et à s'éloigner de la Bourse en mai, pour n'y revenir que six mois plus tard. A leur grande surprise, les deux chercheurs d'Amsterdam ont découvert que ce proverbe était d'une rare efficacité financière. En étudiant l'évolution de 17 Bourses différentes (les principaux pays de l'OCDE) de janvier 1973 à décembre 1996, ils ont effectivement observé que leur performance était généralement mauvaise de mai à octobre, et nettement meilleure de novembre à avril.

"L'effet "Sell in May" tend à être particulièrement fort dans les pays européens", précise Ben Jacobsen. D'après d'autres vérifications effectuées par les chercheurs, l'effet "Sell in May" est ainsi observé à la City depuis 1820. Mais il se vérifie aussi bien dans d'autres pays. En France, par exemple, prédire six mois de hausse de novembre à avril et six mois de baisse de mai à octobre se révèle un bon pronostic plus de deux années sur trois. Et le jeu en vaut la chandelle. Sur les 24 années étudiées, un investisseur qui aurait systématiquement vendu ses actions début mai pour se réfugier en placements monétaires, et qui aurait réinvesti 100% de son portefeuille en Bourse début novembre, aurait obtenu une performance annuelle moyenne de 17,8% en France, alors qu'il n'aurait gagné que 13,4% par an en gardant 100% de son portefeuille en actions sur toute la période (inflation et dividendes inclus). La stratégie de "vendre en mai" lui aurait procuré un surplus de performance annuelle de 2,3% au Japon, de 4% en Angleterre, de 5,4% en Belgique et de 6,7% en Italie. Cette martingale n'aurait rien rapporté aux Etats-Unis (0,24% par an) et aurait été perdante à Hong Kong (2,25% de moins qu'en restant investi toute l'année) et en Afrique du sud (3,7% de moins par an). Les seules raisons scientifiquement valables que les chercheurs ont pour l'instant trouvé pour expliquer l'effet "Sell in May" sont la période et la durée des vacances, particulièrement dévastatrices en été. Nous voilà prévenus.

Gourou prudent
Même à Wall Street, l'optimisme se teinte de prudence. Edward Kerschner, le gourou de PaineWebber, a revu en hausse ses prévisions de croissance de profits pour les sociétés américaines, dans une fourchette de 9% à 12% de progression en 1999 et 2000. Du coup, il estime que l'indice Dow Jones devrait atteindre 11 250 points d'ici la fin de l'an 2000, tandis que l'indice S&P 500 franchirait les 1 400 points. "Mais le marché est déjà pratiquement à ces niveaux, explique-t-il. Ce qui le rend vulnérable et l'expose à une correction à tout moment."


Après les derniers records des grands indices boursiers, la hausse se propage - 14 mai 1999

Chère productivité américaine
Une des énigmes qui tracasse Alan Greenspan est l'incroyable vigueur de la productivité des entreprises américaines. Leur productivité s'est encore accrue de 4% au premier trimestre et Goldman Sachs pense que les entreprises cotées en Bourse ont encore plus de marge d'amélioration que l'ensemble de l'économie. "Nous attendons peu de changements pour l'ensemble des profits des entreprises américaines en 1999, explique Ed McKelvey, économiste chez Goldman Sachs. Cependant, les perspectives de redressement des bénéfices des sociétés de l'indice S&P 500 sont meilleures." En 1998, les gains de productivité de 2,8% des entreprises américaines ont été insuffisants pour absorber la différence entre la hausse de leurs prix de ventes (l'inflation de 0,9%) et la hausse des salaires horaires (4,2%). Les entreprises industrielles ont cependant plus de facilité à accroître leur productivité, par l'automatisation, que les entreprises de services. Depuis dix ans, les gains de productivité du secteur manufacturier ont ainsi atteint 3,6% par an, contre 1,3% pour le reste de l'économie. "Compte tenu de sa plus forte proportion d'entreprises industrielles que le reste de l'économie, l'indice S&P 500 devrait bénéficier de meilleurs gains de productivité", conclut Ed McKelvey. Après un recul de 5,1% en 1998, les bénéfices par action des 500 premières sociétés cotées devraient ainsi remonter de 7% en 1999, estime Goldman Sachs.

Que la reprise profite à tous
Depuis un an, la hausse de Wall Street n'a pratiquement profité qu'aux grandes valeurs de croissance, mais Salomon Smith Barney estime que la reprise devrait se propager aux secteurs en retard. Salomon s'intéresse notamment aux producteurs de machines outils, comme Caterpillar, de papier, avec Mead Corp., et de métaux, avec Nucor, le numéro deux américain. Stanley Nabi, gestionnaire du Callander fund, croit pour sa part au rebond des petites valeurs américaines, qui viennent de traverser leur plus mauvaise période de sous-performance par rapport au reste du marché depuis plus de trente ans.

Même aux pays émergents d'Asie
"La tendance des importations dans les pays d'Asie suggère non seulement que le pire est passé, estime William Dinning, spécialiste des marchés émergents chez Merrill Lynch. Mais aussi qu'une reprise économique est vraiment en cours dans la région." En Corée, les stocks ont été réduits de 21% depuis leur record d'il y a deux ans, les taux d'intérêt ont chuté de 22% au premier semestre 1998 à 5% fin avril 1999, et la production industrielle a bondi de 9,3% sur les deux premiers mois de 1999, après un recul de 7% en 1998. Merrill Lynch a revu en hausse sa prévision de croissance du PIB coréen, à 4,5% pour 1999. En Malaisie, la production industrielle s'est redressée en février pour la première fois depuis treize mois, l'inflation est tombée à 3% en mars et les taux d'intérêt devraient, selon Merrill Lynch, approcher bientôt de leur plus bas niveau depuis vingt ans, autour de 5,5%.


La multiplication des signes de reprise entretient la croissance - 6 mai 1999

Retour de balancier émergent
Après la crise, la résurrection des marchés émergents soutiendra la croissance des pays développés cette année. "Le principal lien direct entre les marchés émergents et les pays développés vient du commerce, explique Martin Brookes, économiste chez Goldman Sachs. Quand un pays en développement subit un choc qui le force à réduire ses importations, chaque amélioration de sa balance des paiements courants représente une perte nette pour le monde développé." Il estime ainsi que la crise asiatique a amputé la croissance des pays de l'OCDE de 0,2% en 1997 et de 0,4% l'an dernier. A l'inverse, le réveil de la demande des pays d'Asie (hors Japon) devrait réduire l'excédent de leur balance des paiements courants de 104 milliards de dollars en 1998 à 66 milliards de dollars cette année. D'après Goldman Sachs, la réduction de cet excédent accélérerait la croissance des pays de l'OCDE de 0,2% cette année. D'un autre côté, la réduction du déficit de la balance des paiements courants du Brésil, de 35 milliards de dollars en 1998 à 20 milliards de dollars en 1999, ralentirait la croissance de l'OCDE de 0,1% cette année. Au total, les pays émergents auraient un impact légèrement positif sur la croissance des pays développés en 1999, ce qui serait une nette amélioration par rapport à leur impact négatif des deux dernières années.

Reprise des matières premières
Après avoir chuté de moitié sur les deux dernières années (pendant la crise des pays émergents), les matières premières ont regagné en moyenne 15% depuis le début de l'année. "Cette reprise est soutenue par une combinaison de réduction de la production et d'amélioration de la demande", explique Steve Strongin, l'expert en matières premières de Goldman Sachs. Les produits énergétiques, qui ont regagné en moyenne 31% depuis le début de l'année, devraient grimper encore de 18% d'ici un an, selon les prévisions de la banque américaine. "Les données fondamentales du marché du pétrole, qui étaient déjà bonnes, se sont encore améliorées depuis un mois", estime Steve Strongin. Goldman Sachs prévoit que le cours du baril évolue entre 17,50$ et 19,50$ d'ici la fin de l'année, et entre 18,50$ et 20,50$ d'ici un an. La banque prévoit par ailleurs un redressement de 11% des produits agricoles d'ici douze mois.

Métaux sous pression
L'horizon est en revanche moins dégagé pour les métaux de base. "Nous continuons de penser que ce sera le dernier secteur à connaître une reprise soutenable", prévient Steve Strongin. Certaines réductions de stocks et de capacités de production ont permis au zinc et au nickel de se redresser fortement au premier trimestre, mais les perspectives du cuivre et de l'aluminium restent moroses compte tenu des surcapacités asiatiques et des stocks excédentaires. "Seule une augmentation soutenue des achats de biens d'équipement en Chine et en Europe de l'est généreraient la demande nécessaire pour que la reprise des métaux de base se poursuive sur l'ensemble de l'année", estime Steve Strongin.


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