Internet High-Tech >

Rédigé le 11 décembre 1996
Comment faire ses courses sur Internet?
Les avantages du lèche-vitrine en quelques clics.

Faire ses courses sur Internet présente de nombreux avantages. Ceux de la vente par correspondance traditionnelle multipliés par la puissance du réseau Internet. Mais se lancer avec son Caddie dans le cyberspace n'est pas non plus sans surprises. Comme toute nouvelle technologie que les utilisateurs et les fournisseurs découvrent à peine, ce n'est pas toujours simple ni complètement au point. Voici donc un aperçu des avantages et des inconvénients qu'il faut impérativement connaître avant de partir faire ses courses sur Internet (lire encadré En résumé, le pour et le contre). Pour les gens qui n'ont pas d'accès à Internet, la première chose à faire est de découvrir le "kit" de matériel et d'abonnements nécessaire pour se connecter. Pour vous guider dans votre shopping "on line", nous vous proposons aussi une sélection de cyber-boutiques que nous avons visité.

Le tour du monde en quelques clics
Selon une étude américaine, l'avantage numéro 1 cité par les clients de la vente par correspondance est la commodité : 55% disent qu'ils gagnent du temps par rapport aux courses dans les magasins et 46% qu'il est plus confortable de faire ses courses de chez soi (source : Catalog Age National Issues Survey 1996). Les usagers du cybercommerce souscrivent à ces avantages, qui sont encore plus évidents avec Internet. Il n'y a même plus besoin de sortir poster sa commande ou d'attendre les heures d'ouverture du standard téléphonique, les cyberboutiques sont ouvertes 24 heures sur 24 et il n'y a qu'à cliquer pour acheter.

Qu'y-a-t-il de si génial là dedans? Les Français vivent avec la télématique depuis quinze ans et le Minitel leur rend déjà de fiers services. Oui, mais Internet offre les mêmes avantages à la puissance 10. Il est d'abord nettement moins cher à l'utilisation. La connexion à Internet coûte le prix d'une communication locale, soit 5 francs de l'heure le soir et 15 francs pendant la journée, alors que les serveurs 36-15 sont facturés 1,29 ou 2,23 francs la minute, soit 77 ou 134 francs de l'heure. Mais la supériorité d'Internet par rapport au Minitel est surtout son ouverture. «Quand on a la possibilité de se brancher sur 300 000 ordinateurs répartis dans le monde entier, on a accès à plus de vitrines qu'en déambulant sur le boulevard Haussmann», résume Jean-François Regnard, professeur de finance à l'ESC Bordeaux qui fait son shopping sur Internet. Au delà des aspects pratiques, cette internationalisation est une ouverture sur un monde infini d'opportunités.

On trouve tout dans les Cyberboutiques
Le second avantage mis en avant par les clients de la vente par correspondance est la possibilité d'acheter des articles introuvables : 47% disent que les objets achetés ne sont pas facilement disponibles dans les magasins. Sur Internet, on trouve absolument tout. Les produits les plus vendus sont un reflet de la population naissante des utilisateurs d'Internet : des logiciels et du matériel informatique, des livres, CD, vidéos, jeux, etc. Mais chacun peut aussi y trouver les objets les plus insolites en fonction de ses centres d'intérêt. Des voitures ou des billets d'avion, des nouilles ou des sauces mexicaines, des montres de plongée ou des accessoires de camping, des cigares ou du champagne, des oeuvres d'art ou de la lingerie, des ustensiles de cuisine ou des clubs de golf... Cet inventaire à la Prévert n'est qu'un échantillon prélevé parmi les dizaines de courriers électroniques reçus dans notre boîte à e-mail en réponse à un questionnaire que nous avions posté sur Internet. En fait, il suffit de penser à un produit, et de taper son nom dans un répertoire de cyberboutiques, comme Internet Mall (voir encadré Quelques adresses pour faire ses courses sur Internet), pour accéder à une liste d'adresses Internet. Il n'y a plus qu'à cliquer dessus pour trouver les objets les plus inimaginables. Le seul problème est que si l'on veut avoir une chance de trouver ce que l'on cherche, il faut impérativement l'écrire en Anglais, car les boutique françaises sont plutôt rares sur Internet.

Les bons prix de l'Oncle Sam
Acheter moins cher est l'avantage que mettent en avant 28% des clients de la vente par correspondance. Sur Internet, c'est encore plus frappant. On peut comparer les prix de multiples commerçants en quelques minutes et faire jouer la concurrence d'un pays à l'autre, en profitant du pouvoir d'achat élevé du franc. Comme la majorité des cyberboutiques sont américaines, tant que le dollar n'explose pas, leurs prix sont presque toujours moins chers qu'en France. Même en tenant compte des frais de port (entre 20 et 40 dollars), des droits de douane (environ 5% pour l'informatique) et des 20,8% de TVA qu'il faudra acquitter à la réception de la marchandise. Dans les boutiques Music Boulevard ou CD Now, les compact discs sont entre 25% et 50% moins chers qu'à la Fnac. Chez Cyberian Outpost, le matériel informatique est 35% moins cher que chez IC Computer, qui est l'un des vendeurs d'ordinateurs les moins chers de France.

Quelques initiatives françaises
Dans l'Hexagone, les distributeurs réagissent sans précipitation à cette menace potentielle. Même les grands noms de la vente par correspondance n'ont pas encore totalement mis au point leurs catalogues sur Internet et restent en tous cas bien plus chers que leurs concurrents américains.

Ce sont finalement les professionnels de l'Internet qui lancent les initiatives les plus en pointe. L'éditeur de jeux vidéos Ubi Soft mène par exemple une expérimentation avec la lyonnaise communication sur le site parisien de multicâble. «Nous y proposons la vente de nos meilleurs CD-ROM avec 10% de remise par rapport aux prix généralement constatés en magasins», explique Alain Pakiry, responsable du marketing Internet chez Ubi Soft. De son côté, le fournisseur d'accès Club Internet vient de conclure un partenariat avec Music Boulevard pour distribuer son catalogue en exclusivité sur son site. «Nous créons un magasin de disque à Paris 20% moins cher que la Fnac», résume Fabrice Sergent, directeur général de Club Internet. En fait, le catalogue est traduit en français, et les prix sont convertis en francs à titre indicatif, mais ils restent facturés en dollars directement par Music Boulevard, qui s'est engagé à assurer l'expédition en France dans de bonnes conditions.

L'intendance suit mal
La livraison est un problème très important pour les clients français, car ils sont nombreux a avoir eu la mauvaise surprise de voir leur paquet bloqué en douane (voir encadré Quelques témoignages de cyberconsommateurs). Avant d'acheter quoi que ce soit sur Internet il est donc primordial de vérifier s'il est possible de se faire livrer en France. La plupart des cyberboutiques américaines qui assurent l'expédition à l'étranger signalent cette option sur leurs écrans. Si elles utilisent les services d'un grand transporteur international comme UPS, Federal Express ou autre, c'est une sécurité supplémentaire. Si la livraison internationale n'est pas prévue, il est toujours possible de la demander aux responsables du magasin par courrier électronique, mais c'est plus compliqué.

Le principal problème du commerce sur Internet est qu'il est né d'un progrès technologique trop rapide par rapport aux réalités matérielles du commerce international. Passer une commande au bout du monde par ordinateur, c'est facile. Mais la plupart des cybercommerçants ne connaissent rien à l'exportation, ses réglementations et ses exigences, ses contraintes ou ses restrictions propres à chaque pays. Pour éviter les déceptions, mieux vaut privilégier les boutiques les plus connues ou celles recommandées par des gens qui les ont essayées. Et ne jamais payer les yeux fermés.

Gilles Pouzin

En résumé, le pour et le contre
Pour Contre
- c'est un accès aux commerçants du monde entier
- les consultations sont bien moins chères que sur le Minitel
- on trouve facilement tout ce que l'on cherche
- c'est aussi beau que la télévision et en plus interactif
- on peut changer de site rapidement pour compare
- les prix sont souvent plus bas que dans le commerce traditionnel
- c'est un support commercial peu onéreux pour les entreprises
- les gens qui l'utilisent en sont satisfaits
- c'est encore cher et compliqué pour la plupart des foyers
- rien ne remplace le contact humain avec les commerçants
- l'infrastructure du réseau est parfois saturée
- le Minitel est trop lucratif pour se laisser concurrencer par Internet en France
- il y a parfois des problèmes de livraison pour les achats à l'étranger
- il n'y a pas encore de vrai standard pour payer en toute sécurité
- c'est en anglais

Quelques adresses pour faire ses courses sur Internet
A l'étranger en France
-Internet Mall : Un annuaire de 20 000 cyberboutiques avec un moteur de recherche pour trouver n'importe quel article ou catégorie d'article.
-Cybershop : Grand magasin où l'on trouve tout, pour la maison, le bricolage, la cuisine, les produits de beauté, les bébés, les cadeaux, etc.
-Cyberian Outpost : Tout le matériel et les logiciels informatiques moins chers.
-Music Boulevard : Toute la musique moins chère, bientôt disponible en français.
-Amazon : Une des cyberlibrairies les plus connues.
-Citizen : Des montres de plongée beaucoup moins chères qu'en France.
-The Smoke Shop : Tous les cigares du monde, sauf cubains (embargo oblige!).
-Webstore : Galerie commerciale avec un répertoire de liens avec d'autres cyberboutiques.
-Club-Internet : Le fournisseur d'accès à l'Internet proposera en janvier l'adaptation française de Music Boulevard.
-Le marché de France : Une vitrine de produits régionaux.
-Planetair : Galerie commerciale où l'on trouve du champagne expédiable dans le monde entier.
-Dégriftour : Les fameux voyages à petits prix, sans le coût du minitel.
-Le monde en Tique : Librairie informatique.
-Le Furet du Nord : Librairie générale, 250 000 titres disponibles.

Quelques témoignages de cyberconsommateurs :
1-Le confort des courses à domicile
Michel Guedj : «Je suis en province et handicapé. Il n'y a pas de commerces sur place et j'ai des difficultés de déplacement. J'achète des disques chez CDWorld et des logiciels shareware. Je paye par carte Visa et ne craint pas plus d'être piraté que dans un supermarché. Mes achats sont livrés en une semaine avec environ 10 dollars de frais de port.»

Commentaire : Internet c'est pratique pour faire ses courses quand on est loin de tout et qu'on a du mal à se déplacer. Mais les clients comme Michel Guedj se plaignent qu'il n'y ait pas plus de cyberboutiques françaises.

2-La mauvaise surprise des Douanes
Sébastien Giroux : «J'ai commandé des CD sur Music Boulevard, en moyenne 25% moins cher que les prix français. Par exemple le CD The Wall, des Pink Floyd coûte 30 dollars (165 francs) contre 250 francs à la Fnac. Les frais de port ne sont pas excessivement élevés : 20 dollars pour les trois premiers CD et 2,25 dollars pour chaque CD suivant. Malheureusement, cinq jours plus tard, mon colis était en dédouanement pour information insuffisante de l'expéditeur. J'ai du payer 234 francs, ce qui ne me fait plus gagner grand chose sur une facture de 821 francs.»

Commentaire : la douane ne vérifie pas tous les paquets, coup de malchance, mais surtout négligence de l'expéditeur, ou plus précisément de son transporteur, qui doit normalement régler ces formalités.

3-Le choix, les prix et la livraison sans histoires
Eric Lapuyade : «J'achète des logiciels ou des accessoires informatiques non disponibles en France chez Cyberian Outpost, une société de vente sur Internet qui permet de trouver ce que l'on cherche en quinze secondes, avec description et photo du produit. Je paye par carte Visa avec une transaction sécurisée sur Netscape et les achats sont livrés en 72 heures par le transporteur DHL qui me refacture environ 5% de droits de douane et 20,6% de TVA. Le port est de 20 dollars pour un logiciel et de 60 dollars pour un colis de 4,5 kilos.»

Commentaire : des rayons à la livraison en passant par la caisse, tout marche à merveille, les cyberboutiques d'informatique sont souvent au point et leurs produits sont standards, si l'on comprend les modes d'emploi en Anglais. Les grands transporteurs, comme DHL, FedEx ou UPS, ont des services adaptés à la vente par Internet qui évitent les problèmes de logistique.

4-Le S.A.V. n'est pas la porte à côté
Manuel Munier : «J'ai acheté un disque dur chez Blue-Planet, en Californie, qui m'a été livré à Metz en trois jours par Federal Express pour 40 dollars de frais de port. Il est tombé en panne et, comme il était sous garantie, le vendeur m'a demandé de le lui renvoyer. Mais le renvoi du même paquet, de Metz à la Californie, toujours par Federal Express, m'a coûté 700 francs, soit plus de trois fois plus cher qu'à l'aller!»

Commentaire : les commerçants américains offrent bien des avantages par rapport aux Français. Leur seul défaut est d'être de l'autre côté de l'Atlantique. Quand on doit leur renvoyer un objet pour bénéficier de la garantie, on ne profite pas des tarifs avantageux qu'ils ont négocié pour leurs expéditions.


Copyright©www.pouzin.com