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Rédigé le 28 avril 1999
Faut-il acheter des valeurs high-tech?
Comment investir dans la technologie après la hausse.


Jusqu'où monteront les valeurs high-tech? En un an, les success-stories les plus célèbres d'Internet, Yahoo! et AOL, ont gagné près de 700%, tandis qu'Amazon.com s'adjugeait 1385%. Bien sûr, le cas des valeurs Internet est exceptionnel. Mais, dans son ensemble, l'indice du Nasdaq, le marché qui abrite le plus grand nombre de sociétés de hautes technologies, s'est envolé de 87% depuis huit mois. Les plus grands noms de la high-tech, comme Intel, IBM ou Microsoft, ont vu leur cours gagner entre 50% et 90% depuis un an.
Evidemment, les déceptions peuvent être aussi sévères. Les mauvais résultats de Compaq et d'Alcatel ont ainsi fait plonger leur cours de 50% en quelques semaines. Entre les envolées vertigineuses et les risques de pertes importantes, les épargnants sont désemparés pour investir dans les valeurs de haute technologie. Est-il encore temps d'en acheter? Comment savoir si elles ne sont pas surévaluées? Et comment les choisir? Voici la réponse des professionnels.

Combien vaut la croissance?
Traditionnellement, les investisseurs utilisent trois critères pour mesurer le juste prix des actions: le rapport cours/bénéfice, le rendement des dividendes et l'actif net par action. Ces critères ne sont pourtant pas adaptés aux particularités des valeurs technologiques qui ont souvent une croissance exponentielle mais qui distribuent rarement de dividendes. "Une petite astuce pour mieux se rendre compte du niveau de valorisation d'une société en forte croissance consiste à comparer son rapport cours/bénéfice avec l'augmentation de ses profits", explique Manuel de Oliveira, gestionnaire du fonds CPR Multimédia. L'action Phillips affiche par exemple un rapport cours/bénéfice de 21,1 (voir tableau) mais ses profits devraient augmenter de 25% entre 1999 et 2000. Du coup, son rapport cours/bénéfice (21,1) divisé par son taux de croissance (25%) représente un ratio de 0,84. Quand ce ratio est inférieur à 1 on considère, très schématiquement, qu'une valeur de croissance est bon marché.

Le seul problème est que cette méthode est inefficace pour évaluer les jeunes sociétés qui ne font pas encore de profits, comme la librairie sur Internet Amazon. Du coup, le courtier américain Montgomery securities utilise toute une batterie d'indicateurs financiers et stratégiques pour évaluer les sociétés d'Internet, comme la marge d'autofinancement disponible (free cash flow), les parts de marché, le chiffre d'affaires par client ou par employé. "Bien que la valorisation des actions Internet soit élevée, même en utilisant nos nouveaux outils de mesure, elle n'est pas sans fondements", conclut Alan Braverman, spécialiste de ces valeurs chez Montgormery securities.

Au delà des rêves.
Même si des perspectives de croissance exceptionnelles justifient l'envolée des cours, de nombreux gestionnaires estiment que la flambée des valeurs Internet est exagérée. "A la fin du premier trimestre 1999, la valeur totale des sociétés d'Internet cotées en Bourse atteignait 650 milliards de dollars alors que leur chiffre d'affaires annuel ne dépassait pas 35 milliards de dollars et que seules trois d'entre-elles affichaient des bénéfices, explique Stanley Nabi, gestionnaire du fonds Callander Asset, à New York. Je ne veux pas investir un centime dans ce secteur." Il est vrai que la valeur de ces sociétés à de quoi donner le vertige.
La société d'information et de divertissements sur Internet AOL vaut ainsi deux fois plus que Walt Dysney, et le courtier sur Internet Charles Schwab vaut 60% de plus que la banque d'affaires Goldman Sachs. "Certaines de ces sociétés rapporteront beaucoup d'argent, estime Michael Bourne, gestionnaire du Finsbury Technology Trust, à Londres. Le problème est que c'est une course d'obstacles et que toutes les valeurs d'Internet sont valorisées comme si elles allaient franchir la ligne d'arrivée alors que beaucoup n'y parviendront pas."

Un secteur incontournable.
Même si les entreprises de haute technologie sont risquées et surévaluées, leurs produits et leurs services jouent un rôle de plus en plus important dans la vie quotidienne et dans la croissance économique. Du coup, de nombreux épargnants ne veulent pas rester à l'écart de ce secteur. "Les investisseurs doivent dédier une proportion de leur portefeuille aux valeurs de high-tech variable selon les risques qu'ils peuvent supporter", prévient néanmoins Brian Grove, gestionnaire du fonds Indosuez Multimédia, à Houston. Les valeurs de haute technologie représentent par exemple près de 25% de l'indice des 500 premières actions américaines alors qu'elles ne représentent que 10% de l'indice Russell 1000 des actions sous-évaluées, réputées moins risquées. "Une fois qu'un investisseur a décidé la somme qu'il veut placer en valeurs high-tech, le mieux est de n'investir qu'un tiers de cette somme dans un premier temps, poursuit Brian Grove, afin de garder des liquidités pour profiter d'un éventuel repli." Une fois ces précautions prises, il ne reste plus qu'à choisir ses armes.

Les choix des gestionnaires.
Logiciels, jeux vidéo, microprocesseurs, télécommunications, biotechnologies, les valeurs high-tech offrent une diversité infinie. Pour aider les néophytes à s'y retrouver, nous avons réalisé, avec l'aide de gestionnaires spécialisés, une liste des vingt sociétés parmi les plus incontournables de ce secteur (voir tableau: 20 valeurs high-tech quasi-incontournables). Un tel portefeuille ne constitue pourtant qu'un début de diversification. "Compte tenu des risques de déconvenues en cas de mauvaise nouvelle sur une société, je répartis mon portefeuille entre 50 et 80 valeurs différentes, prévient ainsi Manuel de Oliveira, et je n'investit jamais plus de 5% de mon portefeuille sur une seule société ".
Les épargnants qui souhaitent bénéficier d'une telle diversification pour moins de 100 000 francs ont donc intérêt à opter pour un fonds spécialisé (voire tableau: Les dix meilleurs fonds Techno). Mais, pour les plus joueurs, les professionnels ne manquent pas d'idées. Manuel de Oliveira croit ainsi toujours aux leaders indétrônables, comme Microsoft, IBM, Intel ou Cisco. Brian Grove s'attend pour sa part à un rebond des fabricants d'ordinateurs Dell et Compaq, des éditeurs de logiciels d'entreprise comme Oracle ou SAP, et d'Alcatel. Laurent Imbert, gestionnaire du fonds Ofima Techno, mise quant à lui sur les surdoués de la technologie européenne, comme Phillips, Cable & Wireless, le spécialiste allemand des logiciels de cybercommerce Intershop, et le courtier italien sur Internet Class Edittori. Quant à Michael Bourne, il préfère en ce moment le secteur délaissé des biotechnologies, avec des valeurs comme Geotex, spécialiste des traitements du genou, ou Genzyme, spécialiste du cholestérol. Visionnaire, il mise aussi sur les actions du Canadien Ballard, qui développe des combustibles non-polluants. Investir dans la technologie, c'est souvent frôler la science-fiction.

Gilles Pouzin

20 valeurs high-tech quasi-incontournables:

Société Activité Pays
Cours (1) au 23-Avr-99
Valeur boursière
en milliards de francs (2)
Rapport
cours/bénéfice (3)
Alcatel Equipement télécom France
118.4
154
25
America On Line Accès Internet Etats-Unis
147
918
423.6
Amgen Biotechnologies Etats-Unis
65.13
206
35.2
Applied Materials Equipement semiconducteurs Etats-Unis
60.75
140
55.4
AT&T Services télécom Etats-Unis
53.38
1,103
24.2
Cap Gemini Services informatique France
140.3
64
39.6
Cisco Systems Réseaux informatiques Etats-Unis
117.38
1,159
79.5
Compaq Ordinateurs et services Etats-Unis
23.13
243
20.3
Dell Micro ordinateurs Etats-Unis
43
676
58.9
Electronic Arts Jeux vidéo Etats-Unis
52.88
20
25.4
IBM Ordinateurs et services Etats-Unis
199.75
1,131
26.2
Intel Microprocesseurs Etats-Unis
61.75
1,269
26.5
MCI Worldcom Services télécom Etats-Unis
91.19
1,044
46.3
Microsoft Logiciels Etats-Unis
86
2,683
55.8
Nokia Equipement télécom Finlande
74
588
44.2
Philips Eletronique grand public Pays Bas
82.75
200
21.1
SAP Logiciels d'entreprise Allemagne
282
113
43.1
Sony Eletronique grand public Japon
11430
244
43.7
Sun Microsystems Ordinateurs et réseaux Etats-Unis
63.31
302
37.7
Telefonica Services télécom Espagne
43.38
303
28.7

(1) en euros, en dollars ou en yens selon le pays,
(2) avec 1$=6,197FF, 100yens=5,173FF
(3) rapport cours/bénéfice sur les prévisions de résultats compilées par Ibes pour le premier exercice clos après juin 1999.

Source: Pouzin.com

Les dix meilleurs fonds Techno:

Nom Promoteur

Performances (1) depuis:

Valeur en Francs
Droits
d'entrée (2)
début 1999

un an

Ofima Techno Ofivalmo
+32.8%
n.d.
16,901 F
6.0%
Fleming US Emg Technology Fleming FF
+31.2%
+47.6%
124 F
n.d.
Saint Honore Techno Media Cie Fi Rothschild
+30.5%
n.d.
806 F
4.5%
Interselex Equity Technology Fimagen AM
+30.0%
+79.7%
3,923 F
n.d.
Natio Fonds Multi Medias BNP
+24.8%
+28.2%
7,668 F
2.0%
DWS Technologiefonds DWS
+22.1%
+41.5%
722 F
4.0%
CPR Multimedia CPR Gestion
+21.4%
+41.7%
2,717 F
4.5%
Multimedia & Technologies Ecofi Arpege
+19.8%
+43.0%
8,135 F
4.0%
Scontinvest Technology Scontinvest
+17.7%
+30.6%
14,340 F
n.d.

(1) au 16 avril 1999 (1euro=1,0706$); (2) négociable.

SOURCE: MICROPAL/Pouzin.com


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