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Rédigé le 11 juin 1996 |
Avec une envolée spectaculaire de 67% depuis le début de l'année
1996, la Bourse hongroise bat tous les records des marchés émergents
et attire le projecteur sur cette région peu renommée pour ses
prouesses financières. Le rétablissement des marchés boursiers
est pourtant l'une des meilleures voies pour faire entrer les pays de l'Est
dans l'ère du capitalisme. Et le rôle des investisseurs étrangers
y est crucial. Pour l'instant, seuls trois pays d'Europe centrale disposent
de marchés boursiers significatifs: la Pologne, la Hongrie et la République
Tchèque (voir le tableau Capitalisation boursière des pays de l'Est.
D'autres
pays sont dotés de Bourses encore considérées comme pré-émergentes.
C'est le cas de la Slovaquie, la Slovénie, Lituanie, Lettonie, Estonie,
Bulgarie, Roumanie, etc. La Russie reste définitivement un cas à
part. "Le marché est tellement peu structuré que personne
ne sait combien il y a de Bourses en Russie, résume Constantinos Grioriadis,
spécialiste des pays de l'Est au département des marchés
émergents de la Société financière internationale.
Il y a 70 à 100 petits marchés auto-régulés, parfois
sans aucune activité." Le seul marché où se risquent
quelques étrangers audacieux est le RTS, le Russian Trading System, un
marché de gré à gré qui cote près de 200
titres, mais dont à peine 25 offrent une liquidité quotidienne.
Confiance
et transparence
L'arrivée d'investisseurs boursiers étrangers est toujours un
signe encourageant pour un pays qui veut s'ouvrir à l'économie
de marché. La réussite des trois plus grosses Bourses de l'Est
en témoigne. "Les investisseurs étrangers représentent
environ 35% des volumes de transactions de la Bourse de Varsovie, 45% de ceux
de Prague et jusqu'à 70% des échanges réalisés à
la Bourse de Budapest", estime Constantinos Grioriadis. L'intervention
des financiers étrangers est particulièrement vertueuse quand
elle est relayée par des investisseurs domestiques. Mais la spéculation
gâche parfois la partie, comme en Pologne en 1993. L'engouement des hedge-funds
new-yorkais mélangé au goût du jeu des 700 000 Polonais
qui boursicotent avait fait flamber l'indice de 700%. Après que la bulle
se soit dégonflée, il a fallu deux ans aux Bourses de l'Est pour
regagner confiance. Encouragés par une croissance économique de
5,3% en Europe centrale en 1995, de nombreux fonds spécialisés
se sont créés pour y investir à long terme (voir le tableau
Les principaux fonds d'investissements). Au début
de 1996, ils ont été relayés par de nombreux fonds diversifiés
américains qui réalisaient les bonnes perspectives de cette région.
En plus de la hausse qu'ils entraînent à court terme, ces investissements étrangers ont de multiples bienfaits. "La transparence est bien meilleure, les sociétés communiquent mieux avec leurs actionnaires et améliorent leur comptabilité, certaines se convertissent même aux standards de comptabilité internationaux très exigeants, observe James Juracka, gestionnaire du Central European growth fund du Crédit Suisse, le plus gros fonds de la région avec 229 millions de dollars d'actifs. Nous faisons très attention à ce que les sociétés dans lesquelles nous investissons soient bien gérées. Nous siégeons même au conseil de six d'entre elles." Mais l'intérêt le plus immédiat d'une Bourse bien rodée, pour les entreprises locales, est surtout que les investisseurs étrangers leur apportent directement de l'argent frais en souscrivant à leurs privatisations et à leurs augmentations de capital.