Sicav & Placements > | Rédigé
le 19 octobre 2000 Misez sur les indices boursiers : Interview de Burton Malkiel. |
Fiche Identité
Burton Malkiel, professeur à l’université de Princeton, Etats-Unis.
Diplômé d’Harvard en 1955, Burton Malkiel a consacré sa
carrière à l’enseignement. Il est aussi directeur du groupe Vanguard,
spécialiste de la gestion indicielle avec 550 milliards de dollars d’actifs
pour 15 millions de clients. Dans son best-seller "A random walk down Wall Street",
réédité six fois depuis 1974, Burton Malkiel défend
la gestion indicielle face aux mouvements boursiers irrationnels. "Miser
sur les indices boursiers permet de profiter d’un maximum d’opportunités".
En quoi consiste la
gestion indicielle et quel est son intérêt ?
"Cette approche consiste à répliquer le plus fidèlement
possible les performances d’un indice boursier représentatif des actions
ou des obligations disponibles sur un marché donné. Cette stratégie
permet d’avoir une bonne diversification et de ne manquer aucune opportunité.
Il y a toujours un pays ou un secteur qui a une meilleure performance que les
autres. En suivant l’indice le plus large possible, vous êtes sûr
d’en profiter. Par exemple quand les valeurs technologiques ont de bons résultats,
vous les avez dans votre portefeuille. Et quand c’est au tour des groupes pétroliers
ou industriels de prendre le relais, pas de problème, vous les avez aussi.
Bien sûr, l’idéal serait de miser davantage sur le meilleur secteur,
mais je suis sceptique sur la capacité des gestionnaires traditionnels
à déterminer régulièrement le meilleur moment pour
passer d’un secteur à l’autre. Le second avantage de la gestion indicielle
est d’avoir des coûts très réduits, car elle entraîne
moins de transactions, ce qui améliore encore ses performances à
long terme".
Cette théorie
fonctionne-t-elle dans la pratique?
"Oui. Sur dix ans, 67% des fonds d’investissement traditionnels en
actions qui existent aux Etats-Unis ont une performance inférieure à
celle de l’indice S&P 500 des 500 premières valeurs américaines.
Et encore, cela ne prend pas en compte la performance des fonds qui ont été
retirés du marché. Sur 355 fonds investis en actions qui existaient
en 1970, 194 ont aujourd’hui disparu. Si l’on étudie les performances
de ces fonds avant leur fermeture on observe qu’elles sont, en moyenne, inférieures
de 2% à celles des fonds qui ont survécu. Les sociétés
de gestion sont habituées à ce processus. Lorsqu’un fonds a une
mauvaise performance par rapport aux autres, la société qui le
gère finit par le fermer ou par le fusionner avec un fonds plus performant.
Ainsi, les mauvais fonds disparaissent des palmarès et elles peuvent
faire de la publicité pour les plus performants".
En France, les fonds
indiciels ont pourtant une moins bonne performance sur dix ans que les fonds
traditionnels
"Cette sous-performance
peut avoir deux origines. L’avantage d’un fonds indiciel est d’être moins
coûteux à gérer, mais il faut que les frais de gestion qu’il
prélève reflètent réellement les économies
réalisées pour ne pas pénaliser sa performance. Un fonds
indiciel bien géré peut avoir des frais de gestion de 0,3% par
an. Certains fonds indiciels ont des frais bien trop élevés ce
qui les pénalise. Ensuite, pour avoir de bons résultats il faut
choisir l’indice boursier le plus représentatif. En effet, certains indices
boursiers, comme le CAC 40, retiennent un échantillon de sociétés
trop restreint et ne prennent pas bien en compte la proportion de titres réellement
disponibles sur le marché, appelé capital " flottant ", ce qui
défavorise artificiellement les sociétés dont le capital
est le plus ouvert aux investisseurs. A long terme, ces choix pénalisent
aussi les performances".
Quel est le meilleur
indice de référence pour investir en Europe?
"Pour les raisons que j’évoquais, nous pensons que l’indice
CAC 40, ou même l’indice Eurostoxx 50, ne sont pas assez représentatifs
de la diversité d’opportunités dont peuvent bénéficier
les investisseurs européens. Nous préférons l’indice MSCI
Europe qui est composé de 560 valeurs et qui couvre aussi bien les pays
membres de l’euro que les autres pays d’Europe occidentale, comme l’Angleterre,
la Suisse ou la Norvège".
La forte proportion de
valeurs technologiques dans les indices boursiers n’a-t-elle pas biaisé
leur performance?
"Je ne crois pas. Les rapprochements d’entreprise et l’émergence
rapide de nouveaux géants dans ces secteurs en forte croissance a obligé
le comité scientifique de Standard and Poor’s à modifier la composition
de ses indices boursiers pour prendre en compte cette réalité
économique et financière. En outre, ce ne sont pas les gestionnaires
indiciels mais plutôt les gestionnaires traditionnels qui ont accéléré
l’évolution des valeurs technologiques en y investissant, pour la plupart,
dans des proportions bien supérieures à ce qu’elles représentaient
dans les indices boursiers".