Sicav & Placements > Rédigé le 26 janvier 1999
Où investir en 1999?
Comment diversifier ses placements.

Chiffres
Faire fructifier son épargne est un éternel dilemme. D'un côté il y a quelques placements sûrs, au rendement ridicule. De l'autre il y a la Bourse, dont les plus-values font rêver, mais qui peut aussi vous ruiner. Entre les deux, un océan d'incertitudes. Quelles crises menacent les marchés financiers?

L'économie sera-t-elle en croissance ou en récession ? Faut-il craindre l'inflation ou la déflation ? Pour tenter d'y voir clair, nous avons analysé les diagnostiques des meilleurs gourous de la finance internationale mais avant de vous livrer leurs pronostiques, petit retour en arrière sur les enseignements de 1998. Les mauvaises surprises se sont succédé à une cadence infernale : chute du pétrole, défaillance de la Russie, menace de faillites bancaires, plongeon du Japon et dévaluation brésilienne. Heureusement, il y aura aussi eu des bonnes surprises avec l'envolée des Bourses européennes et de Wall Street, la flambée des valeurs high-tech et la hausse des obligations. En résumé, il y a toujours autant de risques que d'opportunités. 1999 n'échappera pas à la règle : les années passent, seules les surprises changent.

Diversifiez
Actions, obligations et trésorerie, chaque catégorie d'actifs a sa place dans la gestion de votre patrimoine. Mais leurs proportions doivent varier en fonction de l'horizon de placement de chacun. Nous avons élaboré une répartition d'actifs en compilant les recommandations des grands gérants internationaux et en les adaptant aux besoins des épargnants français, notamment d'un point de vue fiscal. Cette répartition correspond à horizon d'investissement de quatre ou cinq ans (voir le tableau
Répartition d'un portefeuille type).

Actions françaises
Moins en retard mais toujours attrayante

Avec une hausse de 31,5 % en 1998, la Bourse de Paris a connu son meilleur cru depuis dix ans. Du coup, la progression des actions françaises risque d'être plus modérée en 1999. " Nous attendons une poursuite du rattrapage du marché français, mais sa progression devrait être de l'ordre de 10 % seulement ", estime Alain Bokobza responsable de la stratégie d'investissement à la Société générale.

La Bourse de Paris bénéficiera, néanmoins, de trois facteurs de soutien importants en 1999. Tout d'abord, les programmes de rachat d'actions. Une vingtaine de sociétés ont annoncé qu'elles allaient racheter jusqu'à 10 % de leurs propres actions. Parmi les plus grosses, Alcatel, Carrefour, Danone, Elf Aquitaine, Paribas, Saint Gobain, Schneider, Suez-Lyonnaise et Vivendi ont la possibilité de racheter pour 120 milliards de francs de leurs propres actions d'ici la fin de l'année. Ensuite, le retour des particuliers vers la Bourse. Les souscriptions de sicav et fonds communs de placements en actions ont dépassé 50 milliards de francs en 1998. Enfin, troisième facteur, l'appétit des investisseurs étrangers pour les actions françaises. Ils ont investi près de 90 milliards de francs à la Bourse de Paris en 1998. Or ces trois sources de capitaux (entreprises, particuliers et investisseurs institutionnels) ont été l'un des meilleurs soutiens de la Bourse américaine dans les années 90. Leur émergence en France est donc de bonne augure pour le long terme.

A court terme, la Bourse de Paris n'est pourtant pas à l'abri des soubresauts. " Avec le ralentissement économique attendu pour cette année, les bénéfices des entreprises risquent de décevoir les investisseurs ", explique Arnaud Bricout, directeur général de la société de Bourse Meeschaert-Rousselle. Selon lui, ces déceptions pourraient temporairement faire redescendre l'indice CAC 40 autour de 3 700 points, soit une baisse de 12 % par rapport à son plus haut de début janvier. Même si l'année 1999 devrait être globalement positive pour la Bourse de Paris, il faut s'attendre à traverser de nouvelles turbulences.

Quant à la sélection d'actions, la plupart des experts recommandent de privilégier les valeurs les plus en vue, c'est-à-dire celles appartenant au club très fermé des grands indices boursiers européens. La Société générale a ainsi repéré que seuls huit poids lourds de la Bourse de Paris figurent dans tous ces indices : Axa, Alcatel, Elf, L'Oréal, Rhône-Poulenc, Vivendi... et la Société générale.

Actions européennes
La naissance de l'Union favorise les actions

La création de l'euro conforte l'attrait des Bourses européennes. Avec sa monnaie unique, l'Europe devient une sorte de nouvelle Amérique. L'Eurolande a une population et un PIB assez comparables à ceux des Etats-Unis sur un territoire quatre fois plus petit. Comme aux Etats-Unis, le marché intérieur de l'Union représente près de 90 % de son PIB. " L'euro est un catalyseur de la mondialisation ", explique Henri Couzineau, gestionnaire à la banque Worms. Selon lui, c'est d'abord l'amélioration de la rentabilité qui fera grimper les profits des entreprises européennes. " Sans faire de prévision trop hardie on peut facilement envisager 10 % à 15 % de croissance des profits en 1999 et 2000 " , estime-t-il.

Les Bourses européennes profiteront aussi d'un nouvel afflux de capitaux. " Après le record de 1998, nous pensons que les fusions et acquisitions en Europe atteindront 600 milliards de dollars en 1999 et que les rachats d'actions par les entreprises doubleront, pour atteindre 50 milliards de dollars " , prédit Richard Davidson, responsable de la stratégie chez Morgan Stanley.

Le seul problème est que les Bourses européennes ont déjà beaucoup monté, ce qui risque de les rendre aussi volatiles que l'an dernier. En 1998, les actions européennes ont connu leur meilleur trimestre de hausse depuis 1975 et leur troisième plus forte baisse trimestrielle depuis trente ans. Cet environnement n'incite pas les investisseurs à l'originalité. " Sur l'ensemble de l'année, les grosses valeurs devraient avoir les meilleure performances " , jauge Mark Howdle, responsable de la stratégie européenne chez Salomon Smith Barney. La Société générale, toujours elle, a identifié cette fois-çi 45 valeurs qui figurent dans tous les indices boursiers continentaux. Sur le plan sectoriel, Morgan Stanley recommande de privilégier les valeurs de services publics et d'équipement pour les télécommunications.

Actions américaines
Ne jamais sous-estimer l'Amérique

Comme chaque année depuis le début de la décennie, Wall Street donne le vertige aux investisseurs. Alors que beaucoup d'experts s'accordaient pour prédire la fin de la hausse, les 500 plus grosses valeurs américaines ont encore gagné 27 % en 1998. Même quand leur chute semblait irréversible, début octobre, elles ont enregistré le rebond le plus insolent depuis plus de seize ans avec près de 23 % de hausse en quarante jours. Aujourd'hui, Wall Street semble à nouveau surévaluée. La plupart des banques recommandent à leurs clients de réduire leurs investissements en actions américaines pour mettre une partie de leurs gains à l'abri. Mais pas question de déserter la première Bourse du monde. Pour sa sélection d'actions préférées, le courtier Goldman Sachs privilégie cette année les grosses sociétés, comme l'assureur AIG ou le distributeur de gaz et d'électricité Enron, ainsi que deux entreprises incontournables dans le développement d'Internet : Cisco et MCI Worldcom.

Japon et marchés émergents
Crises et résurrections

Même si leur niveau de développement économique est incomparable, le Japon et les marchés émergents ont un point commun : après avoir été la coqueluche des investisseurs ils ont été jetés aux oubliettes. Pourtant, le Japon reste la troisième puissance économique mondiale. Et les pays émergents restent ceux qui ont le plus fort potentiel de développement à long terme. Même s'ils ne sont pas à la mode en ce moment, ces deux types d'investissements sont une diversification sur laquelle aucune grande banque ne fait l'impasse. Et, qui sait, les derniers seront peut-être les premiers, à l'image de la Corée du Sud, dernière au classement 1997 (- 69 %) et discrètement première au classement 1998 (+ 121 %).

Obligations
Le rendement des emprunts d'Etat en France s'est à nouveau effondré l'an dernier, passant de 5,3 % à 3,9 %. Mais cette baisse de taux d'intérêt a fait monter le cours des obligations, procurant aux investisseurs une performance totale de 14,6 % en 1998. Avec l'arrivée de l'euro, qui crée un marché obligataire capable de concurrencer celui des Etats-Unis, les obligations ont encore un intérêt. " Il ne faut pas s'attendre à des performances extraordinaires mais les obligations ont toujours leur place dans un patrimoine diversifié " , estime Didier Pruvost, gestionnaire chez Oddo Gestion. En fait, beaucoup d'épargnants français possèdent déjà indirectement des obligations, par le biais de leurs contrats d'assurance vie classiques. Ces derniers rapportent un peu moins que les obligations elles-mêmes mais ils ont l'avantage d'offrir une garantie contre toute perte en capital.

Trésorerie
Les placements de trésorerie rapportent au mieux 3%. C'est peu par rapport aux 31,5% de hausse de l'indice CAC 40 en 1998. Mais c'est beaucoup par rapport aux 35% de baisse des actions françaises entre juillet et octobre dernier. Compte tenu du rendement et de la fiscalité des différents placements de trésorerie, le Livret A et le Codevi restent les meilleurs choix pour gérer ses liquidités. Aujourd'hui, espérer faire fructifier son patrimoine avec des sicav monétaires serait aberrant. Mais garder de la trésorerie permet d'avoir toujours de l'argent disponible pour profiter des creux de la Bourse qui surviennent toujours quand on s'y attend le moins.

Gilles Pouzin

Prévisions de taux d'intérêt et de change pour fin 1999

En Europe Aux Etats-Unis
Etablissements

Taux d'intérêt

Taux d'intérêt

Cour de l'euro
(en dollar)

Court terme

Long terme

Court terme

Long terme

CDC Marchés

3.00%

3.75%

4.00%

4.90%

1.26

ING Barings

2.70%

3.70%

4%

4.25%

1.21

Salomon Smith Barney

2.75%

4.35%

n.c.

n.c.

1.26

Société générale

3.00%

4.30%

n.c.

n.c.

1.25

CPR Gestion

3.00%

3.75%

4.75%

5.00%

1.20

n.c. : non communiqué

Prévisions boursières pour fin 1999

Aux Etats-Unis

En Europe

Etablissement

Dow Jones

S&P 500

Etablissement

CAC 40

EuroStoxx 50

Goldman Sachs

9850

1275

Salomon Smith Barney

4200

3600

Paine Webber

9750

1250

Société générale

4300

3650

Prudential

9900

n.d.

CPR Gestion

4400

n.d.

Oppenheimer

9970

1275

Meeschaert-Rousselle

3700

n.d.

n.d. : non disponible

En 1999, les économistes s'attendent à ce que les deux principales puissances économiques mondiales, l'Europe et les Etats-Unis, tournent au ralentit. L'absence d'inflation permettra aux banques centrales de baisser leurs taux d'intérêt pour contrer les risques de récession. Les places boursières profiteront de cette détente pour franchir de nouveaux records.

Répartition d'un portefeuille type
(horizon cinq ans)

Actions françaises 25%
Actions européennes 15%
Actions américaines 12%
Actions japonaises 8%
Marchés émergents 5%
Obligations, assurance vie, PEL 25%
Trésorerie, Livret A, CEL 10%
Total: 100%

La décision la plus importante pour bien gérer son portefeuille boursier est de diversifier méthodiquement ses investissements.

25 valeurs à suivre en 1999

France Europe Etats-Unis Japon
Alcatel Elf Aquitaine Endesa (électricité) AIG (assurances) Toshiba (électronique)
Alstom Rhône-Poulenc Nokia (téléphonie) Cisco (réseaux Internet) Nintendo (électronique)
Axa Sanofi-Synthélabo Royal Dutch (pétrole) Enron (gaz, électricité) Fujitsu (informatique)
BNP Société générale SAP (logiciels) General Electric (finance, équipement) Fuji Film (chimie)
Carrefour Vivendi Telecom Italia (télécom) MCI Worldcom (réseaux Internet) Kirin Brewery (bière)

Les grandes valeurs ont toujours la faveur des analystes. Les télécommunications et les services restent en vogue tandis que les pétrolières pourraient remonter. La technologie est considérée comme une valeur sûre, aux Etats-Unis et au Japon.


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