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Rédigé le 18 septembre 1997 |
Pour que les lecteurs puissent évaluer leur future retraite, nous avons voulu leur donner un moyen simple et rapide. Pour ce faire, nous avons demandé au cabinet Hewitt de réaliser des projections du niveau de retraite prévisible en fonction de huit profils de carrière différents. Ces profils de carrière sont un repère essentiel pour estimer sa future retraite, mais ils sont insuffisants. Car la retraite évolue aussi dans le temps, et il est donc très important de prendre en compte l'âge que l'on a pour estimer sa future retraite. Pour ce faire, nous avons calculé la retraite de nos huit profils en fonction de huit classes d'âge, de trente à soixante cinq ans.
Même en ne retenant que l'hypothèse d'un départ à soixante-cinq ans, aucun cadre de moins de cinquante ans, gagnant plus de 30 000 francs, ne pourra prétendre à plus de la moitié de son salaire brut lors de sa retraite. Comme les salaires nets sont amputés d'environ 22% par rapport aux salaires bruts, alors que les retraites ne subissent que 8% de prélèvements, le rapport retraite nette sur salaire net devrait cependant être d'environ 10% supérieur aux taux de remplacements bruts indiqués. La compensation est maigre, car elle laissera de toute façon la plupart des futurs retraités avec une chute de leur revenu net d'au moins 30% ou 40% (lire l'article Comment échapper au krach des retraites?).
Vous
avez soixante-cinq ans.
Pour vous la retraite sera belle. Que vous gagniez 300 000 francs par an ou
quatre fois plus, votre retraite sera d'au moins 50% de votre salaire brut,
soit au moins 60% de votre salaire net. Les moins riches auront bien sûr la
meilleure retraite, du moins proportionnellement à leur dernier salaire. Le
taux de remplacement atteint ainsi 68% pour ceux qui finissent leur carrière
à 23 000 francs par mois, soit près de 80% de leur revenu net. Les différences
sont assez faibles pour ceux qui gagnent entre 30 000 et 54 000 francs par mois,
seuls ceux qui terminent leur carrière à plus de 60 000 francs par mois subiront
une plus forte chute de revenus.
Vous
avez soixante ans.
Votre situation est encore enviable au regard de celle des générations qui suivent.
Votre taux de remplacement, en pourcentage de votre dernier salaire, sera d'environ
1,5% à 2% inférieur à celui qu'ont obtenu vos aînés de soixante-cinq ans. Vos
retraites resteront honorables et vous n'avez pas besoin d'épargner, d'autant
que vous avez sans doute fait une bonne affaire si vous avez acheté votre logement
avant trente-six ans, c'est à dire avant la flambée inflationniste de 1974.
Vous pouvez même vous payer le luxe d'arrêter de travailler dès cette année
en acceptant une réduction de 15% de votre retraite complémentaire.
Vous
avez cinquante-cinq ans.
Vous aurez soixante-cinq ans en 2007, vous êtes la dernière génération qui aura
peut-être encore intérêt à prendre sa retraite à soixante ans. En effet, si
vous quittez la vie active en 2002, votre retraite sera calculée sur le salaire
moyen de vos 19 meilleures années de carrière, tandis qu'en 2007 il sera calculé
sur vos 24 meilleures années. Ressortez toutes vos fiches de paye et refaites
votre calcul. Dans un cas comme dans l'autre, vous avez quand même intérêt à
épargner pour améliorer vos revenus. En économisant 5% de votre salaire pendant
dix ans vous aurez presque la même retraite que ceux qui partent cette année.
Vous
avez cinquante ans.
L'impact du profil de carrière sur la retraite des quinquas mérite un examen
particulier. C'est en effet pour eux que la différence de retraite est la plus
importante entre ceux qui ont bénéficié d'augmentations rapides en début de
carrière et ceux qui ont connu une progression plus linéaire, avec la même augmentation
tous les ans. Ce type de carrières correspond à ceux qui ont débuté modestement
mais qui ont pris du galon après quarante-cinq ans. Avec le même salaire de
début et de fin de carrière, leur retraite est inférieure de 20% à celle de
ceux qui ont été augmenté plus tôt et qui ont donc un salaire moyen de carrière
plus élevé.
Vous
avez quarante-cinq ans.
Pour les générations nées après 1950, la retraite s'annonce plutôt mal. Les
taux de remplacements prévisionnels commencent à décrocher d'un seul coup pour
les cadres aujourd'hui âgés de quarante-cinq ans. L'impact du profil de carrière
joue aussi de plein fouet pour ceux qui n'ont pas gagné beaucoup d'argent pendant
les vingt-cinq meilleures années de leur carrière : pour la première fois, on
leur promet moins de 40% de leur salaire brut pour leur départ en retraite,
ce qui revient à diviser leur revenu net par deux. Il faut épargner, même si
cela ne permet pas de bénéficier d'une retraite aussi dorée qu'aujourd'hui.
Vous
avez quarante ans.
Si vous ne vous êtes pas reconnu dans le profil de carrière le plus lent, c'est
à dire si vous gagnez plus de 18 000 francs par mois, votre retraite n'est pas
assurée : elle sera inférieure à 50% de votre dernier salaire, ce qui équivaudra
à une chute de votre revenu net d'au moins 40%. Il vous reste vingt-cinq ans
pour épargner, en commençant dès cette année à mettre chaque mois 5% de votre
salaire de côté vous avez une chance d'obtenir la même retraite que ceux qui
ont soixante ans en 1997. A condition de choisir des placements qui rapportent
5% de plus que l'inflation, ce que seules les actions offrent sur longue période.
Vous
avez trente-cinq ans.
Plus vous êtes jeune, plus dure sera la chute. Mais l'effet de la capitalisation
joue en votre faveur, car il est d'autant plus fort qu'on peut épargner longtemps
sans se soucier des aléas du court terme. Avant de choisir les investissements
de votre fonds de pension, sachez que sur longue période la rentabilité moyenne
des obligations est de 2% à 3,5% supérieure à l'inflation tandis que celle des
actions est de 6% à 6,5%. Mais pour en profiter à plein, il faut épargner régulièrement
et acheter par tous les temps, c'est à dire ne pas acheter plus quand la Bourse
vient de monter de 50% que quand elle vient de perdre 30%.
Vous
avez trente ans.
Vous ne croyez pas à la retraite et vous avez raison. Quand vous serez vieux
ça n'existera plus. En 2032, vous travaillerez sans doute bien au delà de soixante-cinq
ans. La solidarité entre générations et la retraite par répartition ne seront
plus que le doux souvenir d'une époque où l'on mourait jeune. Vivre vieux n'est
pas toujours une partie de plaisir si l'on atteint un âge avancé où la dépendance
semble inévitable. Si vous arrivez à quatre-vingt ans en 2047, vous vivrez dans
une France de vieux. Il faudra des gens pour s'occuper de vous et il faudra
les payer. Plus vous épargnerez jeune, moins ce sera douloureux.