Retraite & Patrimoine >

Rédigé en septembre 1999
Achetez sans précipitation :
Comment négocier un bon prix?

Lire également les articles : Le guide immobilier, Comment acheter un bien à rénover?

Il faut distinguer la valeur d'un logement et le prix demandé.
Le marché immobilier se prête parfaitement à la négociation.
Quand les prix sont affichés avec une précision d'apothicaire, la tradition du marchandage se perd. Savoir négocier est pourtant une qualité nécessaire pour acheter son logement. Contrairement à la plupart des biens que l'on acquiert dans la vie courante, l'immobilier est en effet l'un des seuls marchés où les prix affichés n'ont qu'une valeur indicative. "Il faut faire la distinction entre la valeur réelle d'un appartement et son prix de vente, explique Gilles Oury, notaire à Paris. Car il y a toujours des personnes qui essayent de vendre plus cher et d'autres qui veulent acheter moins cher."Et ce n'est pas prêt de changer. En effet, le marché immobilier est très hétérogène et il est assez difficile d'évaluer la juste valeur d'un appartement. Avant de vous engager sur un achat d'une telle ampleur, voici donc quelques astuces pour bien négocier.

Visitez, comparez, enquêtez
Vous n'achetez pas une voiture sans l'essayer. Vous en essayez même plusieurs, neuves ou d'occasion, pour tester leur comportement et leur agrément. Vous vous renseignez auprès d'amis ou de collègues pour connaître leurs points forts et leurs faiblesses. Faites-en autant pour l'immobilier. Beaucoup de gens ne passent pas assez de temps pour préparer l'achat de leur logement alors que l'enjeu est considérable.

Avant toute chose, visitez autant d'appartements que possible pour exercer votre jugement sur leurs qualités et leurs prix. "Si vous avez visité un appartement dans l'après-midi, revenez-y le matin et le soir, à l'heure où les gens y vivent", conseille Didier Seror, expert immobilier au cabinet Arthur Andersen. Questionnez aussi la gardienne sur la vie de l'immeuble, elle vous informera mieux que quiconque."Vérifiez ensuite l'état technique et financier de l'immeuble (lire les encadrés : Se poser les bonnes questions et Ce que le notaire doit vérifier). "Appelez le syndic, recommande Gilles Oury, renseignez-vous sur les travaux programmés et demandez le compte rendu des trois dernières assemblées de copropriétaires pour voir les problèmes évoqués."Les ravalements et la rénovation des parties communes s'effectuent en moyenne tous les quinze ans, le changement d'ascenseur au bout de trente ans, la toiture doit être refaite après quarante ou cinquante ans. Si l'un de ces événements approche, il peut vous coûter plusieurs dizaines de milliers de francs en quelques années. Il faudra en tenir compte au cours de la négociation.

Un rabais inférieur à 5 % en moyenne sur le prix de départ
Il existe toujours une marge de négociation et un délai pour mener cette négociation. Le problème est que ces éléments évoluent en fonction de la conjoncture immobilière. Selon les calculs réalisés par le journal "De Particulier à Particulier", les prix de vente réels étaient, en moyenne, inférieurs de 11% aux prix demandés par les vendeurs au début de 1993. Avec le retour des acheteurs, cette marge de négociation s'est réduite. Aujourd'hui, les logements trouvent preneur après un rabais inférieur à 5%, en moyenne, par rapport au prix de mise en vente. Les conditions ne sont donc plus aussi favorables aux acheteurs qu'au plus fort de la crise. D'autant plus que les ventes s'effectuent plus rapidement en période de reprise, ce qui réduit le délai de réflexion de l'acheteur et dissuade le vendeur de baisser son prix trop vite. Alors que certains appartements pouvaient rester sur le marché pendant six mois sans trouver preneur pendant la crise, ils se vendent aujourd'hui en moins de trois mois. Du coup, si vous vendez votre logement pour en acquérir un plus spacieux, comme 80% des acheteurs, ne vous laissez pas surprendre. "Achetez votre nouveau logement avant de mettre en vente l'ancien", préconise Gilles Oury. En effet, si vous vendiez trop vite, vous seriez obligé d'acheter dans la précipitation et vous risqueriez de faire une mauvaise affaire.

Il restera toujours des logements à acheter
S'il existe bien une marge de négociation, elle varie énormément selon les qualités et la localisation du logement que vous convoitez. "Lors de la négociation d'un deux pièces dans le centre de Paris, j'ai reçu quatre offres au prix proposé alors qu'il était supérieur de 10% à l'estimation", raconte Thierry Blanchet, notaire à Paris. Lors de la vente d'un trois pièces avec une belle terrasse, Bernard Lemoigne, notaire dans le Ve arrondissement, a même reçu une proposition de surenchère. "Une pratique qui avait disparu depuis plusieurs années", précise-t-il.
Heureusement, tout le marché immobilier n'est pas en proie à une telle frénésie. Même dans la capitale, tous les quartiers ne connaissent pas un tel engouement. Près d'un tiers des transactions enregistrées au premier trimestre de cette année ont été réalisées à un prix au mètre carré inférieur à celui du quatrième trimestre 1998, ce qui montre bien qu'il est encore possible de négocier.

En réalité, très peu d'appartements méritent d'être achetés sans délai. "Si vous visitez des appartements depuis trois mois et que vous tombez sur une perle rare, vous pouvez vous décider rapidement, estime Gilles Oury. Mais ce n'est pas parce qu'il vous passe sous le nez que vous n'en trouverez pas un autre."Des appartements, il y en a des milliers et il y en aura toujours. Comme dit le proverbe, mieux vaut rater une bonne affaire que de se précipiter sur une mauvaise. Une raison de plus pour bien négocier.

Faut-il acheter par une agence?
Passer par un agent immobilier n'est pas forcément un surcoût ! Certes, pour un bien évalué 1 million de francs, ses 50.000 francs d'honoraires (de l'ordre de 4 à 8% selon le prix) vont s'ajouter aux 85.000 francs environ de frais de mutation. Soit 135.000 francs d'écart entre le vendeur et l'acheteur! Mais "s'arranger"entre particuliers n'est pas toujours le bon choix. Car, d'une part, l'agent immobilier fait le tri pour vous entre toutes les offres qu'il a en portefeuille et il vous guide lors de la visite. En outre, il est nettement plus réaliste que le vendeur, qui s'accroche souvent à un prix hors marché. La négociation peut être plus facile avec ce professionnel qui sait apprécier justement les qualités et les défauts du bien. Ainsi, il vaut mieux payer, après discussion par l'entremise d'un agent, 900.000 francs + 50.000 francs d'honoraires (+ les frais). Plutôt que 1 million de francs (+ les frais) entre particuliers.

Gilles Pouzin

Se poser les bonnes questions

  • Le descriptif de l'annonce correspond-il à la réalité?
    Contrôlez vous-même l'orientation à l'aide d'une boussole. Si l'appartement est censé être calme, visitez-le à différents moments de la journée et faites-le en silence, sans passer tout votre temps à discuter avec l'agent immobilier. Ouvrez les fenêtres afin d'apprécier le bruit de la rue.
  • Le confort de l'appartement a-t-il été bien évalué?
    Chauffage au gaz (moins cher) ou chauffage électrique? Les fenêtres sont-elles doublées ou laissent-elles passer des courants d'air. Les murs sont-ils humides? Vérifiez le système de ventilation dans la cuisine et la salle de bains.
  • Le vendeur ne cherche-t-il pas à vous cacher quelque chose?
    Si vous ne pouvez obtenir précisément le nombre de mètres carrés, ce n'est pas bon signe. Depuis la loi Carrez, la surface de l'appartement doit être indiquée et garantie à l'acheteur. Mais certains vendeurs donnent au départ une surface approximative, en la surestimant. L'acheteur se retrouve devant le fait accompli le jour de la signature. De même, n'acceptez pas des heures de visites imposées, elles cachent parfois une nuisance sonore ou un manque de luminosité.
  • Les structures (toit, charpente, sous-sol...) de l'immeuble sont-elles saines?
    La visite de la cave donne souvent une bonne idée de l'entretien de l'immeuble. Demandez le résultat du diagnostic sur l'amiante tant pour les parties privatives que communes. Si ce dernier n'a pas été fait, vous pourrez le soustraire du prix de vente. Pour les risques de termites, la loi protège désormais l'acquéreur en obligeant le vendeur à fournir un certificat de moins de trois mois garantissant l'absence de termites si l'immeuble est dans une zone à risque.
  • Les charges de copropriété sont-elles élevées?
    Demandez à consulter les relevés de charges envoyés par le syndic de l'immeuble. Dans certaines résidences avec gardien, ascenseur et espaces verts, les charges de copropriété peuvent être très importantes. Et peser sur votre budget avec les remboursements de prêt en plus.
  • Des travaux ont-ils été votés récemment?
    Vérifiez-le sur le dernier procès-verbal d'assemblée générale de copropriété. Cette date est déterminante pour savoir ce qui reste à la charge du vendeur. Demandez aussi à quelle date aura lieu le prochain ravalement. Si le logement convoité a moins de dix ans, bénéficie-t-il de l'assurance dommages-ouvrage? Celle-ci a dû être souscrite par le vendeur et continuera à vous protéger contre tout problème affectant la solidité du bien.
  • La situation financière de la copropriété est-elle saine?
    Exigez de voir l'état des charges impayées établi lors de la dernière assemblée générale.
  • Ce que le notaire doit vérifier :
    L'intervention d'un notaire est obligatoire pour l'achat de tout bien immobilier. Il effectue les démarches administratives pour le compte de l'acheteur, notamment le paiement des droits de mutation, improprement appelés "frais de notaire". Il vérifie l'origine de propriété, c'est-à-dire le compte rendu des précédentes transactions. Il s'assure que le bien ne fait pas l'objet d'une hypothèque au moment de la vente, ou que tous les vendeurs ont donné leur accord si le bien appartenait à une indivision. Le notaire vérifie également l'état du terrain au cadastre, les éventuelles zones de préemption ou les zones dangereuses dans lesquelles l'immeuble pourrait se trouver, ou l'existence de servitudes. Il contrôle le métrage requis par la loi Carrez, le certificat garantissant l'absence de termites, etc. Il exige un dépôt de garantie de 10% au moment de la promesse de vente qui revient au vendeur si l'acheteur ne remplit pas ses obligations.


    Copyright©www.pouzin.com