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Rédigé le 30 mars 2001
Bruce Steinberg
, chef économiste, Merrill Lynch :
Wall Street devrait commencer à se redresser d’ici cet été

Créée en 1915 par Charles Merrill et Eddie Lynch, la maison de titre Merrill Lynch a bâti son succès en facilitant l’accès des épargnants américains à la Bourse. A la fin 2000, les fonds et titres déposés par les clients de Merrill Lynch approchaient 1700 milliards de dollars (11 700 milliards de francs). Ancien professeur d’économie et journaliste au magazine Fortune, Bruce Steinberg a rejoint Merrill Lynch en 1986.

Comment expliquez-vous le ralentissement économique?
L’histoire est simple. La Fed a remonté ses taux d’intérêt de 4,75% à 6,5% entre le printemps 1999 et le second trimestre 2000 ce qui a fait ralentir la croissance avec un décalage de six à neuf mois, comme le prévoit la théorie économique. Ce ralentissement a été accéléré par la hausse des prix du pétrole qui a coûté 50 milliards de dollars aux consommateurs américains. La plupart des ralentissements économiques résultent de cette combinaison de hausse des taux d’intérêt et de choc énergétique. La nouveauté est l’effet d’appauvrissement engendré par le dégonflement de la bulle spéculative du Nasdaq. Mais ce phénomène est moins important qu’on le croit car il est en partie compensé par la hausse de l’immobilier qui s’est poursuivie jusqu’au début de l’année 2001. Si l’effet d’appauvrissement à un impact sur la consommation il ne devrait pas dépasser 2% des dépenses annuelles des Américains.

La faiblesse du taux d’épargne n’est-elle pas dangereuse?
Non, car elle ne reflète pas la réalité. Pour calculer le revenu disponible des ménages, et donc l'épargne restante après qu'ils aient consommé, le gouvernement déduit les impôts que les particuliers payent sur leurs plus-values réalisées. Mais les plus-values elles-mêmes ne sont pas comptabilisées comme des revenus. Si elles étaient réintégrées dans ce calcul, le taux d'épargne des Américains serait probablement plus proche de 9% que de zéro. Je ne pense pas que cela menace la consommation.

Quel est votre diagnostic pour Wall Street?
La Fed a déjà réduit ses taux de 1,5% en onze semaines et elle devrait les descendre encore, probablement jusqu’à 4% d’ici l’été. On peut s’attendre à ce que cette stimulation fasse redémarrer l’économie au quatrième trimestre. Mais Wall Street n’attendra pas aussi longtemps pour redémarrer car il y a énormément de liquidités prêtes à s’investir. Au premier trimestre, l’encours des fonds monétaires des investisseurs institutionnels a progressé au rythme annuel de 82% et les placements de trésorerie des particuliers ont progressé au rythme annuel de 20%. Enfin, la Bourse redémarre généralement dans les six mois qui suivent les baisses de taux de la Fed. Wall Street devrait donc commencer à se redresser vers la fin du printemps ou le début de l’été.

Gilles Pouzin


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