Wall Street > Rédigé le 30 mars 2001
Jo Kalinowski, responsable de la stratégie, IBES :

La reprise de Wall Street interviendra après les mauvais résultats du premier trimestre

Adulés ou critiqués pour leur capacité à faire et à défaire les modes, les analystes financiers ont beaucoup de pouvoir à Wall Street. Pour évaluer leurs prévisions, le cabinet IBES compile les analyses financières de 850 banques et courtiers sur plus de 18 000 sociétés cotées dans le monde. Joseph Kalinoksky élabore des stratégies d’investissements avec ces données.

Pourquoi la Bourse réagit-elle aussi mal au ralentissement des profits des entreprises?
Entre les préparations du passage à l'an 2000, les start-ups de l'Internet et les financements de capital risque, d'énormes capitaux se sont déversés sur le marché. Les dépenses de technologie se sont envolées, entraînant une progression annuelle moyenne de 19% des bénéfices trimestriels des sociétés de l'indice S&P 500 entre le troisième trimestre 1999 et le troisième trimestre 2000. Les analystes ont extrapolé une poursuite de cette tendance et ils ont dû revoir leurs prévisions en très forte baisse quand elle s'est inversée. Les profits du quatrième trimestre 2000 n'étaient plus qu'en hausse de 3,5% au quatrième trimestre de 1999. Il y a trois mois, les analystes prévoyaient encore 5% de croissance pour le premier trimestre 2001 alors qu'ils s'attendent maintenant à un recul de 7,5% des profits pour cette période. Des révisions en baisse de cette ampleur ont rarement existé par le passé.

Quelles sont les perspectives de profits pour l’année 2001?
Les analystes prévoient maintenant un repli de 5% des profits au second trimestre, puis une croissance modeste de 3% au troisième et un rebond de 14% au quatrième trimestre. C'est probablement encore trop optimiste mais cela prend en compte le fait que les baisses de taux d'intérêt de la Fed pourraient stimuler l'économie à cet horizon. Pour l'ensemble des 1200 sociétés que nous suivons, les analystes s'attendent à une progression de 14% des profits pour l'année 2001. Historiquement, ces prévisions sont revues en baisse d'environ 4% au cours de l'année. En doublant ce chiffre pour tenir compte du ralentissement économique, les bénéfices des entreprises américaines pourraient encore afficher 6% de croissance cette année.

Quelles sont les conditions d’une reprise de Wall Street?
Paradoxalement, la généralisation du pessimisme est un bon signe pour Wall Street, car elle laisse plus de marge pour des bonnes surprises que pour des déceptions. Les analystes ont ainsi ajusté leur sentiment à la déprime actuelle. Aujourd'hui, les révisions en baisse de leurs prévisions sont cinq fois plus nombreuses que les révisions en hausse. Nous n'avons observé un tel niveau de pessimisme que deux fois durant les années 90 et deux fois durant les années 80. Par ailleurs, l’accroissement de la masse monétaire est aussi un signe très encourageant car il augmente les liquidités mises à la disposition de l’économie et des investisseurs. Nous nous attendons à un dernier repli du marché en avril, dans le sillage des mauvais résultats du premier trimestre, mais les conditions sont réunies pour que Wall Street connaisse une reprise dès cet été.

Gilles Pouzin


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